En transe ?

À l’occasion de la sortie de la quatrième compilation Hadracadabra, entretien avec Driss, pilier du collectif psytrance Hadra, activiste de la scène électro locale. Propos recueillis par FC

Petit Bulletin : Peux-tu commencer par nous présenter la compilation, les changements éditoriaux par rapport aux précédentes ?
Driss : C’est un concept assez unique, qui rassemble tous les artistes qu’on a invité dans l’année écoulée ; on a donc des morceaux inédits venant à la fois d’artistes de renommée internationale, d’autres plus émergents, et des artistes de notre équipe qui commencent à bien faire leurs preuves. Au niveau des styles musicaux, on n’avait jusque là pas trop intégré la composante progressive, qui connait un beau renouveau en ce moment dans la scène psytrance. Et autour de ce concept, on a en vue des dates de tournées, avec prochainement une date en Belgique et une autre à Marseille, à la rentrée.Comment évolue la scène psytrance ?
On a eu notre grosse période entre 1995 et 1998, avant que ça ne stagne. Mais là, je trouve que depuis deux trois ans il y a une bonne évolution, avec plein de styles différents qui émergent. Ça peut venir d’artistes qui ont introduit des sons assez punk, dans la lignée de Prodigy, les pays nordiques qui entament leur propre révolution en greffant des sonorités sombres, et la progressive qui évolue bien du côté allemand et scandinave.Est-ce que tu sens que le public local est réceptif à vos propositions ?
Grenoble reste une ville très ouverte sur le croisement des genres, on peut le voir par exemple avec un groupe comme Djemdi, qui peut aller dans ces ambiances-là avec des instruments traditionnels… Notre but reste avant tout de faire découvrir les sonorités psytrance au plus grand nombre, aux gens qui écoutent du dub notamment. Après, c’est sûr qu’il y a toujours une frange de puristes qui aime rester sur ses esthétiques. Mais on ne se décourage pas. Sur Grenoble, beaucoup de gens se déplacent pour les soirées à l’ADAEP, en particulier psytrance et drum’n’bass. Et la minimale, même si je connais moins, fonctionne très bien aussi.Qu’en est-il de la prise de conscience des tutelles de l’importance de la scène électro locale ?
Au niveau grenoblois, avec le mandat de Jérôme Safar (ancien adjoint à la culture, NDLR), on a quand même senti l’intérêt politique de développer cette esthétique, surtout avec l’impact d’artistes comme The Hacker et leur rayonnement international. Il y a eu une prise de conscience du potentiel et des choses à faire. Après, on a travaillé aussi de notre côté pour booster cette sensibilisation, mais maintenant, je n’ai pas l’impression que ça avance si vite que cela. En termes politiques, Hadra demeure la seule structure à déposer une demande de subventions pour un projet purement axé sur les musiques électroniques, et on nous a annoncé qu’il y aurait moins de possibilités que l’année dernière ; alors, je sais qu’on est dans un contexte difficile, mais je me demande quand même si on est pris au sérieux.Tu te qualifierais toujours comme un activiste ?
Oui, ça reste de l’activisme à partir du moment où on n’a toujours pas de lieu pour développer ce type de musique. On arrive aujourd’hui à organiser des événements qui rassemblent autour de mille personnes, et compte tenu de cette ampleur, la recherche de lieux reste très difficile. Il y a toujours cette image négative de la musique électronique, cette impression d’une bande de sauvages qui vont débarquer avec leurs chiens et de la drogue, je le vois bien quand je dépose les dossiers pour organiser un événement. Aujourd’hui, pour le festival, on reste dans le statu quo, on n’a toujours pas de terrain. Alors oui, on est dans l’activisme, on est encore loin d’être dans une dynamique de musique actuelle, on est toujours aussi mal vu, le syndrome des raves et des technivals est toujours présent. Pourtant on est sérieux, on gère un budget conséquent sans problème, on a la licence d’entrepreneur du spectacle, au niveau économique, ça brasse de l’argent… Mais cette réticence persiste, aucun maire ne veut prendre de risques, je le ressens au quotidien. Tu restes tout de même un minimum confiant ?
Honnêtement, je vois de moins en moins de perspectives. C’est dommage par exemple qu’il n’y ait pas d’impulsion pour rassembler tous les acteurs locaux et faire un festival qui aurait du poids au niveau national. De notre côté, on travaille déjà sur un concept avec plusieurs acteurs électro pour le prochain festival Rocktambule. Et le succès de notre soirée à Paris le 21 mars dernier nous a redonné la motivation. On a l’impression d’être plus attendu dans d’autres lieux, dans d’autres scènes que celles de l’agglo. Vu la morosité du contexte actuel, à laquelle on est loin d’échapper, le côté positif reste pour l’instant l’exportation…Hadracadabra 4
(Hadra Records / Openzic)

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