Tempête tropicale

Non content de produire quelques-uns des artistes les plus passionnants du moment, le duo londonien Radioclit fait également vibrer les clubs avec des sonorités tropicales dénichées aux 4 coins du globe. Rencontre avec les « Indiana Jones de la musique » avant leur set de samedi au Bar MC2… Propos recueillis par Damien Grimbert

Comment décrire votre univers musical ?Etienne Tron : Nos DJ-sets rassemblent un éventail assez large de toutes les musiques club ghetto du monde, de l'Amérique à la Jamaïque, de l'Afrique au Brésil, des gitans aux indiens peaux-rouges... On n’est pas du tout dans un délire de mix techno où les disques s'enchaînent discrètement. On a toujours avec nous notre ambianceur sud-africain Mo Laudi au micro, et on y va à la bonne franquette, on rejoue les mêmes morceaux plusieurs fois de suite, on saute d'une musique à l'autre... Notre attitude est très influencée par les sound systems jamaïcains, avec l'utilisation d'écho spatial, de bruits de fusée, et un MC pour chauffer la foule à blanc. Le fait de ne rentrer dans aucune catégorie musicale prédéfinie, ça ne doit pas toujours jouer en votre faveur ?C'est vrai qu'on n’est pas encore des superstars qui remplissent les stades, mais en fait, on en est très content. Il est très difficile de coller une étiquette sur ce qu'on fait, on n’obéit pas à une formule fixe, on peut être bookés aussi bien dans des soirées reggae hip hop que dans des soirées électro ou des festivals de musique du monde, on a une liberté d'action sans limites, et petit a petit, on construit notre univers et on étoffe notre discographie. Notre « fan base » s'élargit doucement, et est constituée de gens très ouverts d'esprit et décomplexés par rapport à l'idée de « genres musicaux ». Le scénario gros tube mondial / énorme hype pendant six mois / ringardisation ne nous attire pas trop. On est des producteurs, des gens de l'ombre, on agit discrètement, mais sûrement. Par contre, on cherche vraiment à produire de la musique « pop », accessible, de qualité, fédératrice. On parle depuis nos débuts de « ghetto pop » et en fait on aime toujours cette appellation, cette idée de combiner le brut de décoffrage et l'efficacité a toute épreuve. On adore les musiques débiles à souhait, les cris de gitans bourrés, les remixes de La chenille, il n'y a pas de limite ! Et le second degré en musique n'existe bien entendu pas. Ce qui sort des enceintes sort des enceintes, et ça marche ou pas, quel que soit le contexte dans lequel la musique a été composée.Vous formez avec le chanteur Esau Mwamwaya le groupe The Very Best. Après une mixtape remarquée l’an passé, vous venez de sortir votre premier album ?Warm Heart of Africa est le premier album intégral qui sort de nos studios. Esau Mwamwaya est un chanteur africain du Malawi qu'on a rencontré dans notre quartier de Hackney, à Londres. Il a une aisance vocale dingue, une attitude hyper positive, un sourire en or, il nous a très vite donné envie de faire plus que quelques morceaux. L'album vient de sortir, et on est très content de l'accueil qui lui est réservé, quand on pense que le mec chante dans la langue de son pays. On a eu la chance de pouvoir faire des duos avec M.I.A et Ezra Koenig, le chanteur de Vampire Weekend, ce qui ouvre pas mal de portes. Mais cela dit, Esau n'a besoin de personne pour exister, c'est une star en devenir, la seule vraie star internationale potentielle du Malawi ! Go Esau go !Vous fédérez autour de vous toute une constellation d’artistes…Oui, on s'est créé notre famille musicale grâce à notre résidence mensuelle londonienne « Secousse », consacrée a toutes les musiques tropicales et exotiques du monde. On y booke des groupes live à chaque fois et on a rencontré comme ça beaucoup de musiciens en tout genre, des percussionnistes, des MCs, des danseuses africaines, des groupes géniaux qui ne demandent qu'à exploser. Tous ces gens participent souvent par la suite à nos divers projets, ils viennent danser sur scène pour les concerts de The Very Best, ou viennent enregistrer dans nos studios sur certains de nos morceaux. Quand on a commencé ces soirées il y a bientôt deux ans, on avait beaucoup de mal à trouver d'autres DJs et groupes qui correspondaient a notre délire « tropical », mais aujourd'hui, on a l'impression de vraiment faire partie d'un mouvement. On a rencontré des gens dans le monde entier, de Rio à New York, qui font exactement le même genre de soirées. C'est le nouveau tropicalisme, et après toutes ces années de froid robotique en club, on est bien content de colporter cette chaleur ambiante. Notre maître à penser est bien entendu Yannick Noah, d'ailleurs notre prochain single pour les clubs s'appelle Saga Africa. On n’a jamais eu peur des clichés, on utilise des palmiers gonflables pour décorer la scène partout où on va jouer, on essaie de jouer le jeu à fond.Vous bossez sur quoi en ce moment ? L'album de Marina (Vello, ex-chanteuse de Bonde Do Role, NDDLR) est le plus gros projet pour nous en ce moment, et on est à peu près à mi-parcours. Il sonne très rock (au sens Tarantino du terme, ambiance rockabilly années 50 avec des synthés) et va surprendre pas mal de gens, je pense : il n'est pas très club ni world music, il est écrit en majorité en Anglais avec quand même un peu de Portugais, et le style de Marina a peu de chose à voir avec ce qu'elle faisait avec Bonde Do Role. En plus d'être une bête de scène incroyable c'est une vraie chanteuse naturelle, nous sommes très fiers de faire son premier album solo avec elle. Sinon on va bientôt sortir le maxi Saga Africa en collaboration avec toute la nouvelle école de petits Français qui exploitent cette vibe tropicale : Douster, Myd, Lazy Flow... C'est un peu nos petits frères, on est content de les regrouper sur un projet autour de la musique club africaine.Toujours pas de mix-CD en prévision ?Il y en a tellement qui traînent sur internet que ça nous démotive un peu. On voudrait en sortir un officiel à un moment quand même, ne serait-ce que pour marquer au fer rouge tous les morceaux obscurs amassés au cours des années, et qui sont devenus nos armes secrètes en club. Je crois qu’on l'enregistrera en live dans un club, avec des micros d'ambiance pour capter le son de la foule, on attend juste de faire le set parfait et enregistré dans les meilleures conditions pour se lancer dans cette aventure.

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