Images himalayennes

La culture tibétaine s’installe au Musée Dauphinois. Christian Rausch, photojournaliste qui a réalisé les images de l’exposition, nous en dit un peu plus … Propos recueillis par AM

Petit Bulletin : L’exposition s’intéresse à un peuple de montagnards, d’où le rapprochement avec l’Isère. C’était plus un prétexte qu’autre chose pour parler du Tibet ?
Christian Rausch : Le parallèle avec les Alpes n’était pas dans l’état d’esprit initial. Il s’agissait d’une proposition d’exposition sur le Tibet au Musée de la Résistance, parce que ça nous semblait intéressant de marquer les différents anniversaires liés au Tibet. Au bout de trois mois, on a appris que ce serait finalement au Musée Dauphinois et pas essentiellement sur le Tibet mais sur la culture tibétaine. On avait quand même pas mal de matériel, Marie-Florence Bennes est anthropologue, travaille depuis vingt-cinq ans sur le Tibet ; moi ça fait dix ans que je me rends régulièrement au Tibet et dans l’aire culturelle tibétaine, comme en Inde du nord.Votre travail est le fruit de vos différents voyages ?
On est journalistes tous les deux. En 1999, notre premier reportage traitait du fait d’avoir vingt ans à Lhassa. Je ne connaissais pas le plateau himalayen. Ensuite, j’ai donc eu du plaisir à rencontrer les habitants, même si c’est difficile de travailler là-bas – mais ce n’est pas la faute des Tibétains.Peut-on parler d’une exposition ethnographique, même si elle est centrée quasi-uniquement sur l’image ?
En quelque sorte oui, dans le sens où ça passe par l’exposition d’objets de culte extraordinaires qui n’ont jamais été présentés [des statuettes en bronze provenant de la collection de l’École française d’Extrême-Orient, NDLR]. Généralement, dans ce type d’expositions, peu de place est accordée au texte, pour ce qui est du constat un peu plus ethnographique et historique. On a donc eu un développement réalisé au travers du livre [qui sera publié en janvier 2010, NDLR]. Et effectivement, on a souhaité laisser une large place à l’image, notamment pour montrer le pastoralisme.Considérez-vous votre travail comme politique ?
Pas du tout. La déclaration des droits de l’Homme intégrée à la fin de l’exposition, ce n’est pas moi qui en ai décidé. Mais c’est évidemment quelque chose vers quoi devrait tendre toutes les communautés. Il se trouve que les Chinois ont signé cette déclaration, ce serait bien qu’ils la prennent en compte, alors qu’ils ont dans leur propre constitution le respect des minorités. Nous, qu’est ce qu’on a fait ? On est juste allés voir à quoi ressemblait le Tibet aujourd’hui, en dehors des lieux communs. Olivier Follmi, Matthieu Ricard, et comme beaucoup d’autres, ont fait de magnifiques livres sur le sujet. Mais est-ce qu’ils essaient de montrer la situation réelles des Tibétains ? Quand on a des amis universitaires ou ethnologues qui nous disent que ces ouvrages font plus de tort à la cause tibétaine que de bien, on se doit de réagir. Certes, j’ai mes opinions, mais je suis avant tout journaliste. Le Musée Dauphinois nous a offert une place pour nous exprimer, et non pour avoir un propos politique.Êtes-vous optimiste quant à l’avenir de la culture tibétaine ?
Malheureusement, je suis un peu pessimiste. Les pouvoirs politiques et économiques sont détenus par les Chinois. Pour que le Tibet puisse se développer et que les habitants aient un niveau de vie qui progresse – comme ils le souhaitent –, ils sont obligés de suivre le chemin voulu par les Chinois et travailler pour les Chinois. Ce qui me fait peur, notamment au niveau de la langue tibétaine : dans cinquante ans, sera-t-elle comme le breton en France ? Comme la langue est le vecteur de la culture, il va rester seulement quelques irréductibles moines qui vont continuer à faire tourner les moulins de prières. Mais ce qui peut me donner tort dans ma vision noire de l’avenir, c’est la capacité des Tibétains à s’adapter à toutes les situations. Ils sont sûrement capables de nous étonner.TIBÉTAINS – PEUPLE DU MONDE
Jusqu’au 4 janvier 2011, au Musée Dauphinois.

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