Du jonglage onirique et de la danse énergique : cette semaine, deux propositions pour petits et grands conçues par des artistes passionnants. Pourquoi s'en priver ? AM
Josette Baïz est une chorégraphe atypique : ancienne danseuse chez Gallotta (pour la référence locale), elle élabore depuis des spectacles avec son groupe Grenade : une formation née en 1992, et composée de jeunes issus des quartiers d'Aix-en-Provence et Marseille – aujourd'hui, une cinquantaine âgés de 7 à 18 ans. Pour sa nouvelle création, baptisée Oliver Twist, Baïz a fait appel à quinze d'entre eux, les plus jeunes. « Le thème de l'enfance maltraitée est récurrent dans mes pièces. Il m'a semblé intéressant de le recréer avec des danseurs de 8 à 13 ans » écrit la chorégraphe. Le résultat est bluffant niveau technique, les interprètes étant d'une justesse et d'un professionnalisme étonnants pour leur âge. Dans un décor anthracite relativement sobre, ils figurent le roman de Charles Dickens plus qu'ils ne le racontent – parti pris judicieux qui évite l'écueil de la succession de tableaux narratifs comme a pu le faire par exemple Prejlocaj avec sa Blanche-Neige. En découle alors une proposition agréable à suivre, à laquelle néanmoins on peut reprocher certaines longueurs qui amoindrissent l'intensité générale.
Plateau musical
La question du manque de rythme ne se pose par contre pas avec Deux hommes jonglaient dans leur tête. Pour peu que l'on adhère à la ligne directrice du jongleur Jérôme Thomas et du musicien Roland Auzet, l'heure passée en leur compagnie est un régal, tant pour les enfants que pour les adultes – accompagnés ou non ! Sous l'œil de Mathurin Bolze, les deux acolytes investissent le plateau transformé en capharnaüm d'instruments en bois servant de balles de jonglage version XXL, pour les faire résonner les uns par rapport aux autres. La rencontre entre les deux artistes se fait naturellement, et devient le moteur de la pièce : s'ensuivent alors plusieurs séquences tour à tour poétiques, drôles ou décalées, qui hypnotisent véritablement. Figure incontournable du cirque dit contemporain, forte gueule sans concession (quand on l'a rencontré après une représentation scolaire, il s'est énervé que l'on puisse qualifier son spectacle de jeune public), Jérôme Thomas se fait maître de cérémonie de cette chorégraphie imaginaire, pour brouiller les yeux du spectateur. Un spectateur dont l'esprit est déjà parti vagabonder au son des notes du compositeur contemporain Roland Auzet. À la fin, ils ne sont alors plus seulement deux à jongler dans leur tête : on les a tous rejoints.
OLIVER TWIST
Jeudi 17 février à 20h, à la Rampe (Échirolles).
DEUX HOMMES JONGLAIENT DANS LEUR TÊTE
Mardi 22 à 14h30 et 20h, mercredi 23 à 20h. À l'Hexagone (Meylan).