Allô maman bobos

MUSIQUE/ « Faciliter l’accès du plus grand nombre à la musique classique, et plus particulièrement à l’opéra » : tel est le projet du chef d’orchestre Patrick Souillot, qui monte cette année Carmen au Summum avec sa Fabrique opéra. On l’a interrogé pour en savoir plus, notamment sur ses motivations. Propos recueillis par AM

En cette fin mars, revoici La Fabrique opéra de Patrick Souillot, avec Carmen, l’opéra de Bizet. Un projet mené en amont avec plus de 450 jeunes, porté sur scène par des chanteurs professionnels et l’orchestre universitaire de Grenoble. Un opéra au Summum, mastodonte grenoblois plutôt habitué aux grands concerts pop-rock, ne serait-ce pas là une idée saugrenue ? « Quand on parle de production privée, forcément, ça coûte tellement cher l’opéra qu’il faut des salles très grandes pour amortir les coûts – et je ne parle même pas de gagner de l’argent. » Production privée ? C’est-à-dire ? « Nous n’avons quasiment aucune subvention – en gros, moins de 10% de notre budget. Cette année, on devrait avoir 12 000 euros du conseil général, 2 000 euros de la Métro et 20 000 de la région. On attend le chiffre du ministère, et l’on a zéro euro pour l’instant de la mairie de Grenoble. On s’appuie donc sur du mécénat, et les recettes propres de la billetterie. C’est compliqué de trouver un système où l’on peut mêler tout ça : faire venir du public qui découvre l’opéra, sans prendre de risques financiers inconsidérés. »Bobos vs. Souillot
Quand on l’interroge sur ses motivations – démocratiser l’opéra –, le chef d’orchestre se fait plus virulent, livrant son analyse (discutable) de la situation. « Ça fait depuis l’après-guerre que les ministères et les collectivités essaient de diversifier les publics, mais ça ne marche pas bien. Il suffit de regarder les salles, c’est toujours les mêmes personnes que l’on voit, la même clientèle, les mêmes niveaux sociaux culturels. De notre côté, l’année dernière, nous avons fait une étude sur la fréquentation de nos spectacles : 52% des personnes n’avaient jamais vu de concert classique ni d’opéra. Alors il est évident que c’est très simple de dire ça comme l’on ne fait qu’une production par an, mais ça prouve quand même que l’on arrive à mobiliser beaucoup de spectateurs nouveaux. » Plus tard dans la conversation, il se fait carrément politique, dans tous les sens du terme, regrettant le « manque de considération » à son égard des collectivités locales (mairie en tête), dénonçant une « politique culturelle pour bobos » en faveur des « grandes institutions locales ultra-subventionnées » – on lui laisse la paternité de son analyse. Reste finalement le spectacle en lui-même, le principal. Pourquoi Carmen ? « On ne commence pas la peinture par une toile blanche avec un point vert dans un angle. Il faut donner quelque chose de décryptable immédiatement, qui procure du plaisir et des émotions. Carmen a l’avantage d’être en français : j’ai envie que les gens suivent l’histoire. » Une démarche originale à Grenoble (qui, au passage, rencontre chaque année un succès considérable), même si, derrière la façade culturelle, on devine d’autres enjeux…CARMEN
Du vendredi 25 au mardi 29 mars, au Summum

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