Franche touche

Pour l’anniversaire du Vertigo, un pilier savamment instable de l’électro française vient nous rendre visite : Philippe Zdar du groupe Cassius (à droite sur la photo). L’occasion ou jamais de revenir sur la carrière éclatée de la formation. François Cau

La vocation musicale de Philippe Zdar s’est opérée en deux temps. En premier lieu, un pote lui demande de taper sur une batterie juste pour la rythmique - l’ado rebelle fan des Sex Pistols et de Metallica y mettra tout son cœur. Plus tard, il accompagne son camarade Etienne de Crecy dans ce que les jeunes appellent une “rave“. Il y danse comme un beau diable jusqu’à neuf heures du matin et se dit que sa destinée vient de prendre un tournant. Les habitués le savent, en temps normal, il ne faut jamais faire d’important choix de vie à 9h du mat’ dans une rave. Mais exceptionnellement, ce fut une sage décision. D’autant que Zdar a déjà un partenaire en crime tout désigné en la personne de son pote Hubert Blanc-Francard, qui se fera appeler Boombass dans les sphères musicales pour avoir un peu plus de street credibility (son petit frère lui piquera la combine et se fera appeler Sinclair). Le binôme débute en composant des instrus étranges dans des influences plutôt hip hop (dans leur folle jeunesse, ils participèrent même à des albums de MC Solaar). Après avoir signé de son côté l’album Pansoul avec de Crecy sous le pseudo de Motorbass, Philippe convertit Hubert aux joies du son House, probablement dans une rave à des heures indues. Ils écrivent un premier morceau (Foxxy), rencontrent derechef un accueil chaleureux dans les clubs européens, se choisissent un nom commun en hommage à un boxeur parmi les plus connus (on vous laisse deviner lequel) et la folle aventure démarre. Flotte comme un papillon
Leur premier album, 1999, sort cette même année. Il ressemble de près et de loin à ce qu’on a désigné à une époque comme la French Touch. Un terme générique regroupant des artistes qui n’avaient pas franchement grand-chose à voir les uns avec les autres, si ce n’est d’être français et de faire de la musique électronique. 1999 reprend à son compte, avec une grosse dominante de sons House, le caractère fourre-tout de cette labellisation indéfinie, et glisse de petites touches rock, funk voire même hip hop quand on n’est vraiment pas regardant – le tout monté en boucles histoire de racoler les dancefloors. Une phrase générique en anglais répétés 27 fois par ci ( My feeling for you / have always been real ) un gimmick amusant par là (le bourdonnement récurrent sur La Mouche), il n’en fallait pas plus pour qu’on crie au talent visionnaire à l’époque, et qu’on sourit sans trop de douleur à la réécoute aujourd’hui. Pour leur deuxième production, le duo met le paquet, entend dépasser le son clubbing en explorant des pistes jusque là vierges pour les sonorités House. Las, Au Rêve (2002) sera un four public et suscitera au mieux quelques applaudissements polis de la profession, malgré la petite estime apportée par l’écho américain du single The Sound of Violence. Pique comme l’abeille
En 2006, l’heure de la vengeance arrive avec le troisième album, 15 again, totale déconstruction de leur style vers des affinités encore plus affirmées pour le rock, comme peut en témoigner l’imparable single Toop Toop, dont la rythmique saccadée illustrera à merveille les meurtres politico-mafieux du film Il Divo. La variété et la classe certaine des invités (Etienne de Crecy, M, Pharrell Williams, Sébastien Tellier, le Daft Punk au nom imprononçable) démontrent 1/ l’éclectisme musical et le goût du binôme 2/ des désirs d’évolution stimulants 3/ que Cassius n’est pas mort avec le concept abscons de French Touch, mais a toujours envie d’en découdre. Dans les années suivantes, Philippe Zdar se consacrera à la production et contribuera aux réussites des derniers Rapture, Bloc Party, Beastie Boys et Phoenix. Mais l’aventure Cassius n’est pas terminée pour autant : l’an dernier, Philippe et Hubert, pardon, Zdar et Boombass ont signé chez les “plus hype que ça, ton cerveau explose“ de chez Ed Banger Records et ont sorti un six titres humant bon une électro un rien compassée, mais parvenant tout de même à ses fins sans racolage abusif. En live, on attend de voir ce que monsieur Zdar, qui a tendance à relativiser la fonction de DJ en interview, va délivrer, mais on peut s’attendre raisonnablement à du lourd. Cassius (Philippe Zdar) + Thomas Villard + Fred G
Vendredi 8 juillet, au Vertigo

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