Fous de vous

D’un texte complètement allumé et a priori inadaptable à la scène ("Les Physiciens" de Dürrenmatt), Thomas Poulard fait un spectacle homogène et personnel dans lequel il joue habilement avec la vraie/fausse folie de ses personnages. Nadja Pobel

L’humain a acquis une intelligence telle qu’il doit se protéger de lui-même : c’est ce qu’explique la vidéo qui introduit le texte de Dürrenmatt. Entre message de prévention et dessins animés, l’Amérique enseigne à ses concitoyens que faire en cas d’attaque nucléaire. Bienvenue en pleine guerre froide. Écrite en 1961, Les Physiciens est la pièce la plus connue de l’écrivain dramaturge suisse germanophone Friedrich Dürrenmatt. Les deux pieds arrimés à son sol neutre, il contemple la guerre des blocs communiste et capitaliste en imaginant trois physiciens enfermés dans un asile tuant chacun une infirmière au cours de leur séjour et se prenant rien moins que pour Newton, Einstein et le roi Salomon. Si la valse des allées et venues des commissaires de police et des familles des patients-détenus ajoute à la confusion dans ce bal, le metteur en scène Thomas Poulard fait sans cesse preuve d’imagination pour rendre lisible cette pièce allumée jouées par cinq comédiens pour environ trois rôles de plus.

Fous maîtrisés

Cette contrainte suppose aussi de laisser tout réalisme au placard (les comédiens font semblant de boire un liquide qui n’existe pas, fument des cigarettes virtuelles). Mais pour une fois, ce qui peut parfois apparaître comme une paresse trouve une justification du simple fait que l’on se trouve dans un asile d’aliénés où le vrai et le faux n’ont plus vraiment de sens. Par ailleurs, il y a un tel mouvement perpétuel que l’attention ne se porte pas sur ces détails mais sur les entrées et sorties multiples via trois portes en fond de scène qui claquent comme dans un vaudeville dézingué. Si parfois, le spectacle dérape (la grossière scène où une infirmière en chaleur se trémousse à quatre pattes), il arrive quand même à garder une constante : un univers visuel fort (magnifiques anoraks, vêtements de velours et chemises à fleurs des 60’s !) qui imprègne la pièce pour embarquer le spectateur – avec en plus un twist scénaristique inattendu. Ne boudons pas notre plaisir, ce n’est pas si fréquent.

Les Physiciens, mercredi 14 novembre à 20h et jeudi 15 novembre à 14h, à l’Amphithéâtre de Pont-de-Claix

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