Littérature / S'il y a une qualité que l'on ne peut pas retirer à l'écrivain français Mathias Énard, c'est bien l'efficacité de son écriture. Dans Rue des voleurs, son dernier roman, le récit avance avec la célérité de la société contemporaine, sans jamais perdre ni lasser le lecteur. Lakhdar est un adolescent marocain, échantillon représentatif d'une population qui rêve de liberté et à qui il arrive tous les malheurs possibles et imaginables. Éclairage littéraire sur une Histoire brûlante, le roman déroule les événements du Printemps arabe, ses conséquences et ses racines, à travers son regard, à la fois neutre et malicieux. Le regard d'un être sur qui glisse l'Histoire ; rejeté par sa famille pour avoir « fauté », accueilli par des Islamistes convaincus d'être investis d'une mission et probablement impliqués dans des activités terroristes, exploité par un directeur d'entreprise français, amoureux d'un mirage européen incarné par une jeune Barcelonaise... Le caractère lisse mais fondamentalement libre de ce narrateur fait finalement la réussite d'un roman qui milite pour l'épanouissement personnel au sein d'une société qui serait prête à l'accepter, en même temps qu'il affirme la nécessité de faire parfois des choix relevant du sacrifice... Et après tout, comme le dit Lakhdar, « la vie est une machine à arracher l'être. »
Laetitia Giry
Rencontre avec Mathias Énard, mercredi 21 novembre à 18h30 à la librairie Le Square