Fils de la légende du blues malien Ali Farka Touré, Boureima Farka Touré est parvenu à se faire sinon un prénom, du moins un surnom – « Vieux » – sur les traces de son père. Entre recherche des mélanges et tribut à l'héritage d'un des plus grands pays de musique au monde : le Mali. Stéphane Duchêne
Est-il encore bien nécessaire de présenter le grand Ali Farka Touré, décédé en 2006, sans doute le plus grand bluesman que l'Afrique ait porté. Et, à l'échelle du monde, l'un des plus grands. Comme un autre géant, nigérian lui, le roi de l'afrobeat Fela Kuti dont deux fils sont entrés en religion musicale, Ali Farka Touré a fait un émule dans sa descendance avec Boureima Farka Touré, surnommé Vieux.
Le vieil âne ("Farka", signifiant « âne », est un surnom qui fut donné à son père et qu'il a conservé) est lui aussi en effet un fougueux animal au sang blues qui chemine entre tradition malienne et recherche esthétique (son projet avec le musicien israélien Idan Raichel, The Touré-Raichel Collective).
Car Vieux est autant un enfant du Mali que de la mondialisation, que les collaborations de son père avec des légendes américaines comme Taj Mahal et Ry Cooder n'ont sans doute pas laissé indifférent. Pas étonnant dès lors que les États-Unis soient tombés littéralement en amour avec ce blues virtuose qui cherche, on l'a dit, mais jamais à se prendre pour ce qu'il n'est pas.
Son Pays
Car Vieux sait aussi qu'à la fin de sa vie, son père, retranché au Mali, refusait toute offre de collaboration avec les palanquées de bluesmen du monde dentier venus frapper à sa porte – par peur de vendre l'âme de la musique malienne au Diable de trop.
Alors malgré le succès mondial du multifacette The Secret en 2011, malgré les invitations à chanter aux côtés de Shakira et Alicia Keys à l'ouverture de la Coupe du monde 2010, Vieux Farka Touré ne s'est pas laissé griser, n'a pas cédé aux chants des sirènes, au formatage. Leur préférant le retour aux sources avec le bien nommé Mon Pays, hommage à un Mali en proie aux difficultés politiques qu'on connaît – et affirmation d'une identité aussi.
Un pays qui, musicalement, entre blues saharien, tradition mandingue et oud arabe, est un concentré de continent. Comme un symbole, Vieux s'y est d'ailleurs associé aux cordes scintillantes du griot Sidiki Diabaté... fils du grand Toumani. Mon Pays, comme pour prouver que c'est dans la diversité que le Mali ne fera qu'un. Après tout, comme le soulignait le titre d'un documentaire consacré à Ali Farka que « le miel n'est jamais bon dans une seule bouche ».
Vieux Farka Touré, mardi 12 novembre à 20h30, à la MC2