Cinéma / De et avec Guillaume Gallienne (Fr, 1h25) avec André Marcon, Diane Krüger...
Ce premier film de Guillaume Gallienne tiré de la pièce de Guillaume Gallienne avec Guillaume Gallienne dans le rôle de Guillaume Gallienne – à quand le mug ? – provoque des ovations partout où il passe. Qu'y voit-on pourtant, sans grossir le trait ? Gallienne entrer sur scène pour y jouer ledit spectacle, avant que celui-ci ne s'anime sous la forme d'une suite de saynètes souvent vulgaires et réalisées comme des programmes courts pour la télé, avec toujours le texte de Gallienne en voix-off.
Ça reste du théâtre, mais c'est surtout du "théâââtre", c'est-à-dire cette écriture factice, pleine de licences poétiques et de bons mots, ce que le cultureux aime à appeler avec une pointe de condescendance une « langue ». Le cinéma, lui, est oublié en route sinon lorsque Gallienne incarne aussi cette drôle de créature qu'est sa mère, même si elle n'est qu'un alibi pour revenir au vrai sujet du film : le comédien lui-même et son identité (sexuelle).
Et là, l'incompréhension monte d'un cran ; efféminé et maniéré, le regard que sa famille pose sur lui le persuade d'abord qu'il est une fille. D'où quiproquos. Mais quand on vient lui dire qu'il est homo, il ne comprend pas, puis tente de vérifier la chose. Cela donne deux séquences hallucinantes où Gallienne arrive à convoquer en même temps les pires clichés homophobes (un club où des couvertures de Têtu vivantes se trémoussent torse nu), un profond mépris de classe (Pantin comme antichambre de l'enfer), et des relents de racisme (le pauvre Réda Kateb doit prendre tout cela en charge par son seul personnage).
Cela prépare le vrai scandale du film : une morale sans ambiguïté où l'on dit qu'être gay, ce n'est pas grave, mais qu'être hétéro, c'est quand même mieux. La famille, le mariage (la première fille est la bonne), la grande bourgeoisie (dont Gallienne vient et dont il ne se moque absolument jamais) ; bref, la norme sous toutes ses formes triomphe. Sous les applaudissements, en plus. Vu son succès (envoyez vos courriers à la rédaction qui transmettra), Les Garçons et Guillaume, à table ! a sans doute capté quelque chose de l'air du temps ; mais cet air-là est assez nauséabond.