Les étoiles de Shériff

Laetitia Shériff

La Bobine

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Avec Laetitia Shériff, on a toujours été dans quelque chose de frémissant et d'indécidable, quelque part entre le coup de cœur et le coup de tronche. Cela fait dix ans et (seulement) trois albums (et pas mal d'à-côtés aussi, comme le collectif Trunks) que ça dure ; et ça n'est pas parti pour s'arranger. Toujours aux commandes de sa basse vitupérante, cette disciple revendiquée du grand William Butler Yeats (certains invoquent Lennon, Elvis, Adamo comme marque de naissance, elle c'est Yeats) semble, sur Pandemonium, Solace and Stars, vouloir redonner vie aux armées de la nuit et les projeter en pleine lumière astrale.

Le coup de cœur, on se le mange lorsqu'elle se balade en territoire intime (Fellow) ou inconnu (Far & Wide), le coup de tronche sur des déboulés à la Wash, particulièrement déroutant quand on connaît la douceur de la jeune femme en interview, ou sur un The Living Dead tubesque à double sens, hommage au cinéma fantastique vintage et au peuple du Nord, d'où elle vient.

Et puis parfois le coup de cœur, comme cela arrive dans la vie, se transforme en coup de tronche, lorsque la poussière d'étoile forme un astéroïde grunge ramassant tout sur son passage pour fondre sur le monde, le bien nommé A Beautiful Rage II. Et cela, la réussite quasi parfaite de cet album, outre les atmosphères musicales qu'elle a bâties admirablement, et sans l'aide d'Olivier Mellano, son « compère » de toujours comme elle dit, il faut bien le ranger sous un simple constat : se rendre à l'évidence, ou ne jamais oublier que Laetitia Shériff est aussi une grande chanteuse au sens de grande interprète.

Et s'il est toujours un peu hasardeux de comparer une chanteuse avec ses consœurs sous prétexte qu'elles ont en commun de plaquer une guitare ou une basse sur deux chromosomes XX, on n'est pas loin de penser ici à un petit quelque chose de Tanya Donnelly (Breeders, Throwing Muses, Belly, tout ça) : même élasticité vocale, même douceur contrariée, même pouvoir d'ensorceleuse. Et si effectivement la Shériff a été formée à Yeats, cet album de deuil, de frayeur, de rêve et de vie nous rappelle ce vers d'un autre poète, Ralph Waldo Emerson, qui oserait-on écrire lui va comme un linceul et qui dit : « Que l'ombre étoilée qui tombe la nuit, leur fasse d'éternelles funérailles. »

SD

Pandemonium, Solace and Stars (Yotanka)

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