« Jérôme Kerviel est la personne la plus fiable que je connaisse »

L'outsider
De Christophe Barratier (Fr, 1h57) avec Arthur Dupont, François-Xavier Demaison...

Après le Pape, Jérôme Kerviel a trouvé en Christophe Barratier un nouveau témoin de moralité de poids. Rencontre avec le cinéaste de "L'Outsider", en salle ce mercredi 22 juin.

Pourquoi ce titre L'Outsider ?

Christophe Barratier : Quelqu’un m’a dit un jour : « Jérôme Kerviel n’était pas fait pour être trader, il est arrivé comme un outsider ». Quand ce jeune homme de Pont-l’Abbé est arrivé sur le desk, personne ne soupçonnait que deux ans plus tard il gagnerait 200 fois plus que les autres, et serait huit ans plus tard l’auteur du plus grand scandale financier de tous les temps.

Après l’avoir rencontré, quelque chose ne collait pas dans cette histoire. C’est la personne la plus fiable que je connaisse : je n’hésiterais pas à lui confier les clés de mes maisons, la garde de ma fille, ce que vous voulez… Comment se fait-il que ce type-là, pour moi l’un des plus honnêtes, soit connu comme le plus grand fraudeur de tous les temps ? La version de la Société générale du "loup solitaire terroriste" ne résiste pas à l’épreuve des faits quand on fait 8 jours d’enquête.

N’est-ce pas aussi vous L’Outsider, dans la mesure où vous sortez ici de votre "zone de confort" ?

Si vous le dites, je ne le refuse pas… Mais je ne me suis jamais dit à un moment « je vais montrer que je sais faire autre chose ». L’époque durant laquelle se déroule le film n’a pas grande importance, il n’y a que le sujet qui m’intéresse : si je n’étais pas tombé sur Kerviel, je ne l’aurais pas fait. Mais j’ai été obsédé par l’histoire pendant 3 ans, comme pour Les Choristes.

D’ailleurs, même si cela se passe dans un autre milieu, la thématique n’est pas si différente : on suit un homme qui, a priori, ne ressemble pas au moule dans lequel il entre et qui est victime de son succès…

Pourquoi avoir enlevé le portrait du vrai Kerviel figurant dans la première version du film, en fin de générique ?

Sachant que des échéances judiciaires arrivaient, je ne voulais pas prêter le flanc à un président qui lui aurait reproché de faire du cinéma – déjà que son bouquin avait été mal vu par l’institution judiciaire… Là, on est trop dans l’actualité. Mais sa photo sera dans l’édition DVD, parce que dans 20 ans, les spectateurs ne le reconnaîtront plus. Comme à la fin d’Argo.

Vous avez dû vous obstiner pour monter ce film…

Plus on en parlait, plus les interlocuteurs se barraient. Ils se disaient c’est un film sur la finance, et je m’enrouais à leur expliquer que c’était sur un homme dans le cadre de la finance. Comme sur dix projets de films, neuf se plantent, c’est très facile de dire qu’on n’y croit pas et d’avoir raison.

Curieusement, on a eu une offre pour aller tourner au Luxembourg, parce qu’on défiscalise là-bas. Mais je le sentais moyen : si on m’avait posé la question : « vous dénoncez un peu le système financier tout en étant produit en partie par un pays qui est le roi de l’évasion fiscale », j’aurais eu du mal à répondre…

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