"Tunnel" : la claque venue de Corée du Sud


D’une des pires hantises qui soit (la peur d’être enterré vivant), le réalisateur Kim Seong-hun tire un thriller explorant souterrainement société, politique et médias coréens. Mine d’inventivité, ce cinéma confirme son statut de bouffée d’oxygène dans le panorama mondial.

Roulant vers chez lui, Jung-Soo emprunte un tunnel routier tout neuf qui s’effondre et l’ensevelit. Miraculeusement relié au monde grâce à son téléphone (et à réseau dont l’efficacité laisse, sinon rêveur, à tout le moins envieux), le malheureux automobiliste attend qu’on vienne le secourir. Il devra s’armer de beaucoup de patience…

Le réalisateur sud-coréen Kim Seong-hun ne s’embarrasse d’aucune fioriture : l’accident survient en effet durant les dix premières minutes ; une sacrée gageure lorsque l’on sait qu’il doit rendre captivante les presque deux heures suivantes avec un type littéralement prisonnier d’une montagne vomissant gravats et poussières.

Au pari narratif s’ajoute un défi de réalisation : comment faire exister le décor d’un espace clos et aveugle ? Quelles ressources trouver pour faire rebondir le suspense et son corolaire, l’espoir ? Titillant avec une perversité consommée ses spectateurs claustrophobes (sans compter ceux qui ne le sont pas encore), le cinéaste joue avec la peur primale du noir et détourne le minimalisme en travaillant la profondeur… sonore, ainsi que le contraste grâce au "monde du dehors".

Secours sans issue

Le passage incessant de cet extérieur démuni, échouant à trouver la bonne manière d’aider Jung-Soo, à son tombeau crée une tension supplémentaire pour le spectateur. Il subit son pouvoir d’ubiquité en assistant impuissant aux efforts simultanés des deux parties, et succombe à toutes les relances. Parmi celles-ci figure la prise en charge par le pouvoir politique et les médias de cette "aubaine" en matière d’image (il y a toujours des profits à tirer d’un sauvetage spectaculaire), ainsi que le cynisme du pouvoir économique qui pèse avant tout le rapport bénéfices/risques de l’opération.

Sans se transformer en un pamphlet qui casserait la dynamique méticuleuse de son film, Kim Seong-hun instille ce qu’il faut d’éléments signifiants pour désigner les hyènes, les chacals, les vautours et leurs répugnantes collusions. Au moment où la Corée du Sud voit son ancienne présidente Park Geun-hye inculpée pour corruption, ce Tunnel présente un insondable écho…

Tunnel
de Kim Seong-hun (Cor. du Sud, 2h 06) avec Ha Jung-Woo, Doona Bae, Dal-Su Oh…

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Mardi 4 novembre 2014 De July Jung (Corée du Sud, 1h59) avec Doona Bae, Kim Sae-Ron…

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