François Marry : « Avoir un discours politique sans être moralisateur »

François & The Atlas Mountains

La Belle Électrique

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Effectif remanié, nouvelle approche musicale, textes à la résonance plus politique... Sur son quatrième album "Solide Mirage", le groupe français Frànçois & the Atlas Mountains semble avoir abordé un nouveau cycle qui doit autant aux circonstances et à l'ère du temps qu'à une volonté de se renouveler sans se renier. Explications avec François Marry, montagne en chef, avant leur passage à la Belle électrique.

Vos trois premiers albums constituent une trilogie à laquelle Piano Ombre (2014), qui a connu un beau succès (grâce notamment​ au mini tube La Vérité), a mis fin. Comment avez-vous abordé ce nouveau cycle qui s'ouvre avec Solide Mirage (2017) ?

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François Marry : Les premiers albums avaient été enregistrés dans le sud, notamment près de Bordeaux, ce qui donnait quelque chose d'assez solaire et d'assez pastoral. Là, on a créé Solide Mirage à Bruxelles, où une partie du groupe s'est installée. Le groupe a aussi changé de line-up : un nouveau jeune génie belge [David Nzeyimana alias Le Colisée – NDLR] est arrivé, ce qui a pas mal rafraîchi notre son.

C'était un vrai challenge d'appréhender la création d'un album de manière différente. On avait déjà beaucoup tourné avec ces morceaux, ce qui nous a permis d'y mettre un côté plus instinctif, moins alambiqué, avec plus de guitare. Comme à chaque aventure de Frànçois & the Atlas Mountains, cet album tient du concours de circonstances et du renouveau.

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Entre Piano Ombre et Solide Mirage, un certain nombre d'événements tragiques ont eu lieu. On sent que l'album, qui en plus a été enregistré à Molenbeek, semble imprégné de l'actualité politique du moment. Est-ce que ce contexte a joué, même de manière inconsciente ?

Oui. Quand on crée un album, on catalyse tout ce qu'il y a autour de soi. Et ce dans quoi on a le plus baigné ces derniers mois ou années, ce sont ces événements. Ils sont devenus la matière de l'écriture des morceaux.

Le fait aussi d'être à Bruxelles a beaucoup joué. En vivant au cœur de l'Europe, on voit les choses différemment. Il y a une sorte de présence dans les morceaux. Les esprits et les fantômes de tout ce qui nous arrive socio-politiquement agissent de la même manière que l'inspiration théorique ou esthétique.

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Mais l'air du temps est tellement porté sur ces questions que tout l'album est lu à travers ce prisme. Or, il en était déjà question sur d'anciens morceaux comme La Vérité, Cherchant des ponts ou La vie dure. C'était un discours politique mais la période l'étant sans doute moins qu'aujourd'hui, sa lecture avait été différente. Et je crois qu'on pourra réécouter Solide Mirage dans quelques années et en faire une lecture poétique complètement dégagée de cette pesanteur.

Le disque s'ouvre donc sur Le Grand dérèglement, qui traite de la question des migrants. Est-ce que le titre de l'album, Solide Mirage, est une allégorie de cette question, celle du mirage contre lequel viendraient se briser les espoirs de ces migrants ?

Oui, même si en réalité c'est un petit peu plus que ça. On peut le voir d'un point de vue politique et actuel, en référence à l'imaginaire de ce que peut être l'Europe du point de vue d'un migrant qui traverse les continents pour arriver en Europe et découvrir que le bout du voyage n'est pas aussi onirique qu'imaginé.

Mais on peut aussi le lire d'un point de vue personnel et spirituel : comment on appréhende ce qui va nous arriver dans notre vie, comment on avance dans l'existence en fonction de nos rêves, nos fantasmes, nos projections professionnelles. Et le côté aléatoire et incompréhensible de ce qui arrive.

Comment, dans l'écriture et la composition, conserver, sur des sujets graves, une certaine légèreté et le côté lumineux que revendique le groupe, comme c'est le cas sur Le Grand dérèglement ?

Avoir un discours qui fait écho à des événements politiques sans être moralisateur est sans doute ce qu'il y a de plus difficile mais il s'agit simplement pour moi d'un changement de la matière, du vocabulaire et du discours, dans lesquels je vais puiser. Ceci dit, on nous a parfois fait le reproche de n'être pas assez orientés ou radicaux mais, pour moi, ce serait raté que le texte l'emporte sur le reste.

On peut écouter Solide Mirage sans écouter les paroles comme on peut l'écouter sans faire attention aux références musicales. On essaie de faire des objets assez complets et, en ce qui concerne la méthode d'écriture, on recherche un certain équilibre. Et la question des différents degrés de lecture est très importante pour moi.

Pour cet album, vous avez changé pas mal de choses, mais vous avez conservé le producteur de Piano Ombre, Ash Workman...

On a eu pas mal d'opportunités pour cet album, autant à l'étranger qu'avec des producteurs français. Mais au dernier moment, le choix s'est rabattu Ash, parce qu'il y avait justement assez de changements dans notre vie et notre manière de faire pour apporter un renouveau.

On avait envie d'aller au plus simple, de manière fonctionnelle, avec un studio qui était à notre portée à Molenbeek, ce qui géographiquement et économiquement était plus simple, et un producteur avec lequel on avait déjà travaillé. Faire avec ce qu'on a sous la main devrait être l'attitude politique la plus saine et la plus vivable dans les temps à venir, plutôt que de fantasmer sur des solutions théoriques qui viennent d'ailleurs.

Frànçois & the Atlas Mountains
À la Belle électrique jeudi 18 mai à 20h30

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