Yann Frisch : « La magie est un langage à part entière »

Le syndrome de Cassandre

Hexagone

ce spectacle n'est pas à l'affiche actuellement

Nouveau cirque / Sacré champion du monde de magie avec un numéro qui a fait le tour du web et des télés, le prodigieux Yann Frisch, 27 ans, truste désormais les théâtres avec "Le Syndrome de Cassandre", seul-en-scène métaphysique troublant de noirceur alliant clown et magie. Interview et critique avant le passage du spectacle par l’Hexagone de Meylan.

Vous êtes un artiste atypique adepte du grand écart, puisque vous vous produisez aussi bien dans des scènes nationales comme l’Hexagone de Meylan que sur France 2 dans Le Plus grand cabaret du monde

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Yann Frisch : Oui, car en réalité, je viens de là aussi. J’aime bien le beau music-hall, les beaux numéros de clowns. Par exemple, une de mes petites fiertés avec Baltass [le numéro qui lui a valu ses titres, vu plus d’un million de fois sur Youtube – NDLR] est qu’au moment où il a commencé à buzzer sur Internet, dans la même semaine j’avais des propositions de scènes nationales et du Crazy Horse. Cette forme-là de magie séduit des réseaux et des milieux très différents. C’est quand même une petite réussite, d’autant que ce n’était pas une intention de départ.

Peut-être est-ce parce que la magie est l'un des derniers arts populaires qui s'adresse à tout le monde...

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Maintenant, beaucoup d’artistes commencent à poser un regard d’auteur sur la magie. Elle devient alors un langage à part entière. Mais il ne faut pas qu’une certaine magie en remplace une autre. Il faut que les choses s’élargissent, s’ouvrent. Je suis absolument convaincu de son potentiel artistique. Je serai mort avant d’avoir fini d’imaginer tout ce qu'il est possible de faire avec ce qui n’est d’ailleurs pas vraiment une discipline, car la magie n’est pas liée à un artisanat. C’est plus un concept, car elle peut relever de l’agilité manuelle, de la construction.

Comment avez-vous découvert la magie et le cirque ?

Cela s’est fait plus ou moins en même temps. J’ai d’abord commencé par découvrir le jonglage, une première passion quand j’avais 9 ans. La magie est arrivée quand j’en avais 10-11. J’ai ensuite pratiqué ces deux disciplines sur mon temps libre : la magie de façon un peu autodidacte, avec des bouquins, et le jonglage et le cirque via une école de cirque municipale, près de chez moi au Mans. Je faisais régulièrement des présentations publiques, je participais à des festivals.

Vers 16-17 ans, à l’âge où se pose la question de savoir ce qu’on veut faire dans la vie, je me suis rendu compte que je voulais faire du spectacle. Je suis parti faire une formation de cirque préparatoire à Lyon, à Ménival, sachant que je me sentais plus proche de ce que je voyais en nouveau cirque qu’en magie. C’est à Lyon notamment que j’ai découvert le clown. Quelque chose s’est déclenché. Puis j’ai intégré l’école du cirque de Toulouse, le Lido.

Dans Le Syndrome de Cassandre, vous incarnez un véritable personnage. Pourquoi l'avoir imaginé si sombre, au point de tout prendre à contre-pied ?

L’idée de base est partie d’une improvisation en clown : j’étais arrivé sur scène avec une bouteille d’eau et j’avais dit aux gens qu’un incendie se déclenchait en coulisses et qu’il fallait que tout le monde parte en précisant bien que ce n’était pas une blague. Évidemment, personne n’est parti. Et quelqu’un est venu me voir en me disant que personne ne pouvait me croire parce qu’on ne peut pas croire un clown. Non seulement on ne peut pas le croire, mais en plus on n’a pas de doute.

C’est là où ça devient un peu tragique : tant qu’un clown ne se "déclownise" pas, qu’il garde sa voix un peu chelou, sa façon de bouger et ses expressions, il est condamné à être un personnage qu’on ne peut pas croire. Ce n’est pas que le clown n’existe pas, mais il n’existe pas dans notre réalité. À moi de faire que son réel ne soit pas comme le nôtre. C’est pour ça que la magie vient naturellement incarner le fait qu’il ait un rapport à l’imaginaire plus concret que nous.

Mais alors pourquoi, à la fin, nous expliquer les tours ? Pour réduire l’écart entre son univers et le nôtre ?

À la fin, il tente de jouer à l’humain car il se rend bien compte que personne ne le croit. Sa dernière tentative est de ressembler à l’homme : saluer, remercier les gens, parler du théâtre, du décor mais, comme il le fait au mauvais endroit, on ne le croit toujours pas. Il explique des choses mais on voit bien que c’est faux. Donc au lieu d’enlever un masque, il remet le sien de façon encore plus caricaturale. Et comme il s’énerve, il devient encore plus clown qu’avant. Sa volonté de se faire passer pour autre chose que lui échoue complètement. Sa nature le rattrape.

Le Syndrome de Cassandre
À l’Hexagone (Meylan) du mardi 17 au jeudi 19 octobre à 20h

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