Le parcours d'un pompier parisien, de l'adrénaline de l'action à la douleur du renoncement après l'accident. Une histoire de phénix né à nouveau par le feu qui faillit le consumer, marquant (déjà) la reconstruction d'un cinéaste, Frédéric Tellier, pourtant parti de guingois avec son premier long.
Jeune sapeur-pompier dévoué et heureux en ménage, Franck (Pierre Niney) aspire à diriger des opérations sur des incendies. Hélas, sa première intervention se solde par un grave accident le laissant plusieurs mois à l'hôpital, en lambeaux et défiguré. Un lent combat pour réapprendre à vivre commence...
Consacrer un film à un soldat du feu juste après avoir jeté son dévolu sur la brigade du Quai des Orfèvres ayant traqué Guy Georges (dans le très inégal L'Affaire SK1, 2014) risque de laisser penser que le réalisateur Frédéric Tellier donne dans le fétichisme de l'uniforme ou des agents du service public. Pour autant, ses deux longs-métrages n'ont pas grand-chose en commun, si ce n'est qu'ils s'inspirent d'une histoire vraie et bénéficient de l'appoint d'un bon co-scénariste, David Oelhoffen (auteur par ailleurs du réussi Frères ennemis sorti en octobre dernier).
Tellier débute sans prendre de gants par une contextualisation brute et édifiante du "métier de sauveur", dans son urgence permanente, sa diversité, sa dévotion, sa discipline – rappelant au passage que les membres de la Brigade sont une unité de l'Armée, donc des militaires encasernés saluant les couleurs de cette dernière de leur étrange Marseillaise syncopée. Documentarisant le quotidien jusqu'à l'extrême, Sauver ou périr suggère qu'il traitera uniquement des rouages complexes de ce merveilleux corps global, organisé et soudé ; un écran de fumée.
Gueule cassée
C'est pourtant avec la rupture d'un engrenage, d'un corps individuel, que le film bascule dans un récit bien différent, en marge du groupe structurant et de la cellule familiale. Détruit physiquement, Franck doit se rebâtir une apparence mais également un futur hors de son idéal professionnel.
Plus original que les mille histoires de renaissance déjà vues ailleurs (à l'exception notable du Scaphandre et du Papillon), Sauver ou périr fait passer l'abominable "performance" d'acteur au second plan, en s'intéressant plutôt aux parcours psychologiques de chacun des personnages : Franck évidemment, mais aussi son épouse, son infirmière, ainsi que ses frères d'armes, dont la solidarité impuissante s'émiette face au ressentiment du survivant, condamné à demeurer spectateur de ce qui était davantage que sa vocation – sa vie. En cela, c'est davantage un film choral qu'un solo pour Niney. Une partition n'a du sens que si elle jouée collectivement.
Sauver ou périr
de Frédéric Tellier (Fr, 1h56) avec Pierre Niney, Anaïs Demoustier, Vincent Rottiers...