De Jean-François Richet (Fr, 1h50) avec Vincent Cassel, Freya Mavor, Denis Ménochet...
Galérien évadé reconverti en marchand, Vidocq (Vincent Cassel) veut prouver au chef de la sûreté non seulement qu'il est innocent des crimes dont on l'accuse, mais aussi que les méthodes de la police sont dépassées. Alors il recrute son équipe de repentis et emplit les prisons à sa façon... Quand le cinéma historique télescope ironiquement l'actualité... Non pas en présentant l'ascension d'un ancien truand vers les sommets du pouvoir, mais en montrant comment l'État sait parfois sinueusement manœuvrer pour garantir son intégrité.
Qui mieux que Vidocq peut incarner ce mélange de duplicité talleyrandesque et de méritocratie à la française ? Cette légende dorée du proscrit devenu superflic, usant de la langue et du surin de la canaille pour mieux protéger le bourgeois. Un "bon" voyou, en somme, et donc un parfait personnage pour le réalisateur Jean-François Richet qui s'offre ici une reconstitution épique et soignée remplaçant avantageusement la blague ésotérico-fantastique de Pitoff avec Depardieu (2001), et rappelant la série avec Brasseur. Son film souscrit aux exigences du divertissement, mais magnifie les côtés sombres, les alcôves et les caves. C'est la puissance tirée des paradoxes et la gloire de l'ombre qui en sont le vrai sujet.
Si chez Richet, la trame politique est primordiale, et l'élévation sociale du peuple une obsession, son sens du cinéma passe par l'esthétique de l'image et son goût pour les acteurs. Grâce à des interprètes aux trognes puissantes tels que Denis Lavant (gargouille grimaçante) ou Denis Ménochet (sorte de Javert acharné), il instille du Daumier et du Hugo dans son œuvre. À sa place en Fouché matois, Fabrice Lucchini surprend moins que James Thierrée en noble explosif. Quant à August Diehl, ici en opposant et qui fut il y a peu Karl Marx ou sous-marinier dans Kursk, il confirme tranquillement qu'il est bien le nouveau comédien polyvalent du cinéma européen.