La rentrée ciné 2019, au(x) fil(ms) des semaines…

Sortie triomphalement au printemps, "Parasite" de Bong Joon-ho, la Palme d’or du dernier Festival de Cannes, laisse un boulevard aux films de l’automne, qui se bousculent au portillon. À vous de les départager ; ex aequo autorisés.

18 septembre

Avec Portrait de la jeune fille en feu, Céline Sciamma (Bande de filles, Tomboy, Naissance des pieuvres...) filme, sur fond de dissimulation artistique, le rapprochement intime et intellectuel de deux femmes à l’époque des Lumières. Une œuvre marquée par la présence invisible des hommes, le poids indélébile des amours perdues et le duo Noémie Merlant / Adèle Haenel. Prix du scénario à Cannes.

À la même date, venu de Venise et des étoiles, Ad Astra, dans lequel James Gray embarque Brad Pitt pour un voyage galactique – après le Tarantino, Brad place ses billes pour l’Oscar.

25 septembre

Dans un futur proche, un petit village aidé par son vieux chaman et sa drogue rendant combatif résiste encore et toujours à l’État résolu à le rayer de la carte… Après Aquarius, le réalisateur brésilien Kleber Mendonça Filho s’associe à Juliano Dornelles pour livrer, avec Bacurau, une fable picaresque aux faux airs d’Astérix brésilien, aussi corrosive que sanglante.

Premier long-métrage en forme de claque cuisante, Ceux qui travaillent d'Antoine Russbach fait d’un Olivier Gourmet glaçant le bras armé du capitalisme sans états d’âme – pléonasme. Une plongée dans les coulisses du consumérisme ordinaire exigé par le confort occidental. À vous faire devenir décroissant.

2 octobre

Embouteillages à prévoir le premier mercredi d'octobre où se télescoperont Gemini Man, le thriller fantastique d'Ang Lee qui oppose Will Smith face à lui-même plus jeune ; Alice et le maire de Nicolas Pariser où Fabrice Luchini en premier édile lyonnais à bout d’idées embauche une philosophe (Anaïs Demoustier) pour lui redonner du carburant (précédé dès son tournage d’une sulfureuse rumeur locale – parce que prémonitoire ? –, il a été récompensé à la Quinzaine des Réalisateurs) ; et Atlantique de Mati Diop, grand prix de Cannes qui emprunte les chemins du fantastique pour évoquer la situation des réfugiés.

9 octobre

Les premières images de Joaquin Phoenix en Joker (un concurrent sérieux à l’Oscar pour Brad Pitt ?) sous la direction de Todd Phillips laissent entrevoir une composition tout en nuances d’ombres et de noirceurs : la Mostra de Venise (où il est en compétition) va se régaler. Il nous faudra hélas attendre le 9 octobre pour découvrir les origines de l’antagoniste préféré de Batman.

Le même jour sortira Papicha de Mounia Meddour, chronique d’une jeunesse algéroise au début des années 1990 portée par la solaire Lyna Khoudri dans le rôle-titre d’une étudiante faisant courageusement face à la terreur islamiste dévorant son pays.

23 octobre

Éric Toledano et Olivier Nakache (Intouchables, Le Sens de la fête...) s’intéressent à nouveau au monde du handicap dans Hors normes dans lequel ils font de Vincent Cassel et Reda Kateb deux éducateurs spécialisés encadrant des adolescents autistes. Une comédie très applaudie en clôture de Cannes.

Un festival où concourait également Sorry we missed you : dans la lignée de It’s a free world (2008), le nouveau Ken Loach montre jusqu’où l’uberisation libérale se faufile au nom de la rentabilité, qu’importe si elle asservit les plus précaires. Ou les achève. Bienvenue dans le monde des Gafa !

30 octobre

Vétérans du cinéma italien, Marco Bellocchio signe avec Le Traître un film de plus sur les repentis de la mafia, qui n’a rien d’un film de trop. Comme chez Matteo Garrone ou Paolo Sorrentino, on y lit entre les lignes (de cocaïne) un portrait tragi-comique de la classe politique transalpine passée… et actuelle.

6 novembre

La nouvelle sensation de l’animation française s’appelle J'ai perdu mon corps. Cette fable noire de Jérémy Clapin racontant comment une main sectionnée part à la recherche de son corps a très justement emballé les publics et jurys des festivals de Cannes et d'Annecy. Formellement décalé et culotté, il mérite de connaître le même succès que Ma vie de courgette.

13 novembre

Autre animation de qualité, Je veux manger ton pancréas de Shin'ichirô Ushijima. Ne vous fiez pas à ce titre digne d’une série Z gore, il s’agit d’un très joli mélo à la Love Story avec une ado fantasque.

Le même jour, on rongera son frein à la perspective de voir Matt Damon et Christian Bale réunis devant la caméra de James "Logan" Mangold pour Le Mans 66. On en viendrait presque à devenir temporairement tolérants quant au taux de particules fines.

Toujours à la même date sortira J'accuse avec Jean Dujardin, Louis Garrel et, naturellement, Emmanuelle Seigner. Roman Polanski, qui traite ici de l’Affaire Dreyfus, tentera à nouveau d’accrocher à son palmarès la seule distinction majeure à lui manquer : le Lion d’Or vénitien.

20 novembre

Plus que Victor Hugo, c’est évidemment La Haine (un quart de siècle plus tard) que Les Misérables de Ladj Ly évoque avec cette impeccable chronique d’une banlieue ordinaire. En suivant 24 heures d’une patrouille de la Brigade anti-criminalité, on en apprend autant qu’en lisant une thèse de socio ou un quelconque livre blanc. Prix du jury cannois amplement mérité pour ce film par bien des aspects plus prémonitoire que constatif.

Le même 20 novembre sortira également le vénéneux In Fabric de Peter Strickland, une histoire faustienne de vêtements empoisonnés...

4 et 11 décembre

On finira notre année avec deux films de la Croisette. Le 4 décembre, Elia Suleiman livrera, avec It must be heaven, un nouveau tome de son bloc-notes de pince-sans-rire keatono-tatiesque, voyageant entre la Palestine, Paris et New York. Quand l’absurdité burlesque rencontre le politique – au cinéma, parce que dans la vraie vie, c'est fréquent.

Et la semaine d'après, Terrence Malick renouera avec le biopic pour Une vie cachée, inspiré par l’histoire d’un Autrichien ayant refusé de se battre avec les nazis.


Et aussi

Un jour de pluie à New York : sortie de purgatoire pour Woody Allen avec Timothée Chalamet et Elle Fanning (18 septembre).

Au nom de la terre : Édouard Bergeon dirige Guillaume Canet dans une fiction inspirée par son documentaire sur le monde paysan dont il est issu (25 septembre).

Vous êtes jeunes, vous êtes beaux : Franchin Don imagine des combats clandestins entre séniors et offre des rôles retenus à Gérard Darmon et Josiane Balasko dans un film à l’esthétique impeccable (2 octobre).

Matthias & Maxime : retour de Xavier Dolan devant et derrière la caméra, bredouille à Cannes (16 octobre).

Terminator : Dark Fate : Schwarzy l’avait promis, "he’s back" dans le sixième opus de la série, avec Linda Hamilton et Edward Furlong en prime, devant la caméra de Tim "Deadpool" Miller (23 octobre).

Doctor Sleep : la suite de Shining par Mike Flanagan avec Ewan McGregor, on en attend davantage que de Ça chapitre 2 (30 octobre).

Little Joe : sur le papier, ça se tenait cette histoire de plante génétiquement modifiée. Mais les ficelles de Jessica Hausner sont grosses et l’originalité… discutable. Prix d’interprétation féminine pour Emily Beecham lors du dernier Festival de Cannes (13 novembre).

Terminal Sud : Rabah Ameur-Zaïmeche dirige Ramzy Bedia dans un drame. La possibilité d’une bonne surprise (20 novembre).

La Reine des neiges 2 : vous pensiez être libéré, délivré ? C’est raté. Merci, Jennifer Lee et Chris Buck (20 novembre).

Chanson douce : Lucie Borleteau adapte le terrifiant Goncourt de Leïla Slimani avec Karin Viard en nounou criminelle. Prometteur (27 novembre).

Proxima : après Maryland, Alice Winocour expédie Eva Green dans l’espace avec Matt Dillon (27 novembre).

Gloria mundi : après leur transit à la Mostra de Venise, Robert Guédiguian et sa troupe reviennent dans les salles (27 novembre).

Seules les bêtes : un polar de Colin Niel adapté par Dominik Moll avec une distribution de prestige comprenant Laure Calamy, Denis Ménochet, Valeria Bruni Tedeschi ou encore Damien Bonnard (4 décembre).

Les Envoûtés : Sara Giraudeau et Nicolas Duvauchelle chez Pascal Bonitzer. Pourquoi pas (11 décembre).

Star Wars : L'Ascension de Skywalker : J.J. Abrams de retour pour remettre de l’ordre dans la Force (18 décembre).

Notre Dame : Valérie Donzelli filme la cathédrale et après, l’édifice brûle. Coïncidence (18 décembre) ?

Les Traducteurs : un polar en huis clos façon Huit femmes signé Régis "Populaire" Roinsard avec Lambert Wilson, Olga Kurylenko ou encore Riccardo Scamarcio (18 décembre).

Petit Vampire : Joann Sfar livre enfin son adaptation animée. Voilà la cargaison de Noël (18 décembre).

Le Lac aux oies sauvages : Diao Yinan a longtemps cru que la Palme serait pour lui ; ses oies (qui en ont deux chacune) le consoleront (25 décembre).

Les Incognitos : les studios Blue Sky (L’Âge de Glace) s’attaquent au monde de l’espionnage (25 décembre). Par pudeur, on ne parlera pas de Cats (même jour).

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