Danse / Critique du spectacle que le chorégraphe grenoblois redonnera à la MC2 (du mardi 17 au jeudi 19 décembre) dix ans après la première.
Il y a encore une décennie, la société aurait parlé de "crime passionnel" pour évoquer l'histoire de L'Homme à tête de chou, album-concept culte de Serge Gainsbourg sorti en 1976. Où l'on suit la lente dérive d'un homme, journaliste pour une feuille de chou, qui commet un Meurtre à l'extincteur sur Marilou, femme qu'il est censé aimer. Un féminicide, mais artistique, dans la tradition de ces œuvres qui glamourisent la mort des femmes coupables d'en faire voir de toutes les couleurs à ces pauvres hommes.
Une histoire tragique, reflet de notre société et rentrée dans le Panthéon de la chanson française, que Jean-Claude Gallotta a pris comme un matériau haut de gamme – ce qu'elle est, tant niveau textes que musiques (on parle de Gainsbourg tout de même). Un matériau relu par Alain Bashung et le musicien Denis Clavaizolle, avec notamment une réorchestration (voire une amplification – congas, guitares, trompettes, violons...) grandiose. Un exemple : le morceau Marilou Reggae, devenu encore plus généreux, groovy, dansant...
Ce qui tombe plutôt bien, cette bande son étant destinée à la danse. À celle de Jean-Claude Gallotta donc, l'un des artistes phares de la danse contemporaine française, qui synthétise ici tout son monde. Sur le plateau nu, ses douze danseurs et danseuses ne racontent par l'histoire (ça, c'est pour les chansons) ; ils ne la miment pas non plus : ils la vivent, grâce à la grammaire gallottienne (des courses, des sauts, des jeux de bras...) aux premiers abords économe, mais qui évoque et l'amour charnel que suscite Marilou, et la passion destructrice du narrateur. « Dieux, pardonnez nos offenses, la décadanse a bercé nos corps blasés et nos âmes égarées » comme le chantaient Jane Birkin et Serge Gainsbourg en 1971 dans la bien nommée Décadanse.
L'Homme à tête de chou
À la MC2 du mardi 17 au jeudi 19 décembre