Poésie de la cabane

Festival / Aux sources du lac d’Annecy, le festival d’architecture des cabanes laisse carte blanche à de jeunes professionnels du monde entier pour intégrer des cabanes dans des sites naturels remarquables. Libérés des contraintes techniques et d’usages, les créateurs transforment ces abris rustiques en œuvres sensibles et originales. Jusqu’à fin octobre, 12 réalisations primées sont à découvrir sur le territoire. Une bonne idée de week-end.

Le but affiché du festival : « Retrouver le lien entre nature et culture, entre architecture et paysage. » C’est particulièrement flagrant avec “La Charbonnière”. Cette cabane à l’aspect primitif et vaguement conique se dresse au bord d’un ruisseau, à 5 km au sud du lac d’Annecy, dans la combe d’Ire. Le nom semble peu adapté à cet endroit si paisible, au plus profond d’une forêt épaisse. Seuls les habitants connaissent la fureur dont peut être pris le cours d’eau lors des épisodes orageux. Par beau temps, des badauds y batifolent et parmi eux quelques curieux venus découvrir la cabane, un empilement de bûches dressées en forme de manteau. Son entrée dérobée donne accès à une sombre galerie – le foyer – aux parois constituées de madriers noircis de suie. Cette création du collectif Exercice est pleinement connectée au site et à son histoire : jadis le bois était exploité pour la fabrication du charbon, et, des édifices similaires, s’échappaient des panaches de fumée qui envahissaient la combe.

Revisiter le territoire

Cette relation étroite des cabanes avec le paysage proche et lointain est l’un des attendus du concours d’architecture organisé en amont du festival. À l’initiative de ce rendez-vous, créé il y a cinq ans, un duo : David Hamerman, architecte, et Philippe Burguet, directeur de la Soierie, une association sociale et culturelle basée à Faverges. « Notre territoire est marqué par une mauvaise qualité de l’urbanisation, estime ce dernier. C’est de l’urbanisation générique, avec des centres-bourgs et une zone artisanale autour. Comme ailleurs en France, les aménagements et les espaces publics sont dominés par la fonction d’usage. C’est moche. L’idée du festival est de sensibiliser l’ensemble des acteurs sur la question du grand territoire, sur la façon de s’y installer en orientant leur regard vers la dimension sensible de l’architecture. »

La relative facilité de construire une cabane est un atout supplémentaire : « En effet, peu de réglementations entrent en jeu. La cabane permet de remettre l’architecture au centre des débats et de réaliser un exercice de pure forme. » Et pour débrider l’imagination des concourants, les organisateurs imposent également peu de contraintes aux projets : l’utilisation du bois local comme matériau de construction, une surface au sol de maximum 6m² et un coût maximal de 1500 euros. Pour le reste, carte blanche est laissée aux architectes. « Nous n’imposons pas de programme ni de fonctions aux cabanes. C’est une liberté offerte aux architectes. Pour ne pas limiter leur créativité, nous déclarons les cabanes comme des œuvres d’art. La dimension poétique est au centre de l’intervention. »

Concrètement, les choses se passent en plusieurs temps. Les candidats prennent connaissance du lieu où sera installée leur création, conçoivent puis envoient leur projet à un jury qui délibère – et doit se montrer très sélectif. Pour les douze sites retenus, les organisateurs ont reçu 149 candidatures en provenance de 19 pays. Les 12 cabanes choisies ont été fabriquées durant l’été et ne seront démontées qu’en novembre. Sur chaque site, un panneau explique la démarche et un QRcode renvoie vers une page Web pour enrichir encore ses connaissances. Une formule qui plaît : « Nous ne contrôlons pas ce qui se passe dans les cabanes, mais elles sont régulièrement utilisées par les habitants, qui se les approprient pour des concerts, des réunions ou des stages. Certains y dorment ou y font la fête. C’est une des réussites du festival : leur impact est indéniable. Le seul deal, c’est de laisser le site propre. »

Festival des cabanes
Autour d'Annecy jusqu'à fin octobre
www.lefestivaldescabanes.com/fr

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