Découverte / Changement de programme. À défaut de pouvoir jouer son spectacle immersif tiré de la BD éponyme de Mathieu Bablet, Christelle Derré, directrice artistique du collectif poitevin Or Normes, est venue à l'Hexagone de Meylan lundi 29 et mardi 30 mars, à la rencontre d'étudiants. Des échanges fructueux dont elle nous a parlé dans la foulée.
Souvenez-vous... ou fouillez nos archives : au Petit Bulletin, en octobre dernier, nous vous avions parlé de la nouvelle BD de Mathieu Bablet, Carbone et Silicium. Le jeune auteur nous avait alors expliqué qu'il avait dû prendre du recul après le succès de son précédent album, Shangri-La, en lice au Festival international d'Angoulême et vendu à plus de 100 000 exemplaires. On a vite fait le rapprochement quand le même titre est réapparu du côté de l'Hexagone, coproducteur et promoteur d'un concert visuel et immersif inspiré de l'ouvrage. L'univers SF de Mathieu Bablet est si puissant que l'on regrette que les dates prévues à Meylan aient été annulées cette année. Ce maudit coronavirus !
Une œuvre recomposée
En attendant, c'est avec une sincère curiosité que l'on a discuté avec Christelle Derré, la directrice artistique d'Or Normes, le collectif à l'origine du spectacle. Faute de jouer, la jeune femme a rencontré des collégiens, des lycéens, mais aussi des jeunes de l'École supérieure d'art et design et des étudiants en arts du spectacle à l'Université Grenoble-Alpes. Elle s'est présentée à eux comme artiste transmédia. « La singularité de mon travail consiste à prendre une œuvre et à la recomposer sur différents supports, en réalisant une autre œuvre sur chacun de ses supports. Shangri-la se décline ainsi en trois nouveaux formats : une smart fiction lisible sur un téléphone, qui permet d'incarner l'un des trois personnages ; le concert immersif qui devait être joué à l'Hexagone ; et une troisième forme développée en réalité virtuelle. » Des œuvres indépendantes, qui puisent chacune dans des parties différentes de la BD ou dans d'autres dessins, restés inédits. « Si vous avez accès aux trois, vous constaterez qu'elles se répondent, évidemment. »
« Les inviter à rêver »
Christelle Derré a pris un réel plaisir à échanger avec des étudiants, accompagnée par un musicien et sound designer, David Couturier. « Nous leur avons présenté nos processus de création et nos outils d'écriture. On a également pu mettre les jeunes de l'école d'art en situation, en réalisant une captation sonore et en travaillant sur une bande originale musicale, sur la base de certaines de nos images issues du spectacle. Avec les étudiants en arts du spectacle, on est aussi revenu sur nos anciennes créations. L'occasion de montrer tout le chemin parcouru par cette notion d'œuvres transmédia. C'était important de témoigner, d'échanger avec eux et de répondre à leurs questions. De les inviter à rêver et à se sentir libres de se saisir tous les potentiels, formes et outils qui existent aujourd'hui. » Le collectif Or Normes, lui aussi, tire quelque chose de la discussion : « Cela nous permet de nous réinterroger et de prendre un peu de distance avec ce que l'on vient de créer. On fait un pas de côté, on sort de notre bulle : c'est utile ensuite pour nous aider à transmettre. » Le grand public, lui, devra être patient pour découvrir Shangri-la à l'Hexagone : il devrait y être joué en octobre 2022, au cours de la biennale Experimenta.