Jarry : « Souvent, les skis vont plus vite que mon corps »

Jarry

Summum

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Humour / Entretien téléphonique de sortie de douche avec Jarry : « Ma première interview tout nu ! » Avec toute sa sincère bienveillance et son autodérision, l’humoriste a finalement enfilé un slip pour nous parler de son nouveau spectacle, qu’il jouera le 12 février au Summum de Grenoble.

Le titre de votre spectacle, c’est Titre. Vous nous expliquez ?

Titre, parce que c’est difficile de définir deux heures de spectacle en quelques mots ! Comme tous les soirs le spectacle change en fonction des spectateurs et de la ville dans laquelle je joue, je l’ai appelé Titre, comme ça les spectateurs peuvent l’appeler comme ils veulent.

Je parle de ma famille, de mes enfants, de ma maman, des femmes en général et de la chance que j’ai eue d’avoir tout au long de ma vie des femmes incroyables qui m’ont protégé, qui m’ont inspiré, qui m’ont donné énormément de soutien. Je parle de tous les sujets qui m’agacent, de mon enfance, des choses que je trouve absurdes dans la société... J’essaie de dire aux gens qu’il ne faut pas trop se prendre au sérieux, mettre les choses un peu à distance, parce que sinon on est trop dans l’affect, dans le sentiment. Mais surtout je me moque de moi ! Comme je suis un panier sans fond en termes de bêtise, j’ai plein de choses à dire sur moi.

On aime particulièrement votre talent d’improvisateur : verra-t-on encore de l’improvisation dans ce nouveau spectacle ?

Exactement, une vingtaine de minutes sont réservées à l’improvisation à chaque date. C’est important, parce que les gens viennent me voir tous les soirs dans des lieux différents. Un spectacle, c’est avant tout une rencontre entre le public et nous ; j’adore découvrir les spécificités des endroits où je joue, que ce soit la gastronomie, les noms des villages et des villes, les chansons… Je découvre à chaque fois des choses incroyables !

Que vous inspire Grenoble ?

Je n’y suis pas venu souvent. Mais à chaque fois on me dit : « Grenoble, c’est une cuvette. » J’adore cette expression, je trouve que c’est pas très valorisant pour les gens de Grenoble (rire) ! Après, vous avez la chance d’avoir la montagne juste à côté, souvent les gens font du ski chez vous le week-end ; eh bien par exemple, la montagne et moi on n’est pas compatibles ! J’ai le vertige en altitude, et souvent les skis vont plus vite que mon corps, ça pose un léger problème… C’est des petites choses comme ça qui sont rigolotes !

Vous avez longtemps joué dans de petites salles, au début de votre carrière ; vous interveniez aussi dans des lycées, des maisons d’arrêt… Est-ce là que vous avez aiguisé votre aptitude à l’improvisation ?

C’est exactement ça. C’est là où on apprend à être à l’écoute des gens, à ne pas tricher, à ne pas faire semblant de les écouter pour faire une blague. C’est-à-dire qu’on s’inspire vraiment de la réponse et on leur dit : vraiment, tout ce que vous allez faire et dire aura une conséquence dans le spectacle. C’est ça que j’aime. Je crois que les gens – encore plus aujourd’hui où on nous a interdit pendant deux ans de nous réunir – ont besoin de s’approprier ce moment, de ne pas être que des spectateurs qui s’assoient et regardent Jarry pendant deux heures. Aujourd’hui, il faut qu’on se retrouve, qu’on se parle, qu’on se touche, c’est ça qui m’intéresse. Moi je fais ce métier pour le côté tactile, pour sentir et ressentir les gens, créer une vraie relation. Sinon, je fais des sketches à la télé !

Pensiez-vous, alors que vous écumiez les petites scènes d’Anjou, un jour afficher complet ou presque sur une tournée des Zénith ?

Jamais Madame ! (Soupir) Et tant que je ne suis pas sur scène, je n’y crois pas encore. Quand je regarde en arrière, ça fait dix ans que je fais ce métier, j’ai l’impression de m’être coupé de tout pour pouvoir réussir à être ce que je voulais être. Ne pas aller aux enterrements, aux mariages, aux anniversaires… J’étais toujours sur scène, je devais travailler. Mais j’aime tellement ça !

Ce n’est pas que mon Zénith, c’est aussi le Zénith des gens qui m’ont soutenu depuis dix ans. C’est la province qui a fait ce que je suis aujourd’hui. Les gens qui viennent de là d’où je viens, c’est eux qui m’ont porté. J’y suis attaché car je viens à 200% de cette France-là, souvent un peu négligée. Moi je suis extrêmement fier d’être un artiste populaire, de représenter tous ces gens qui se lèvent avec le soleil, qui font des métiers manuels… C’est leur Zénith aussi, c’est comme ça que j’entrevois les choses. J’emmène sur scène toute mon histoire, ma famille. J’emmène tout ce que je représente, c’est-à-dire un gamin qui est né dans un village de 600 habitants, milieu vigneron, qui s’est découvert homosexuel… Il y a dix ans quand j’ai commencé on disait : « il ne va faire rire que les Parisiens, parce qu’en province, les homosexuels on les brûle », en gros c’était un peu ça. Et aujourd’hui je rentre dans le cercle fermé des humoristes qui font les Zénith. Encore une fois on a sous-estimé ces gens de province. Moi je leur dis à quel point je les aime, et à quel point je suis fier de venir de la terre.

Et puis, on grandit avec notre public ; ce qui me faisait rire il y a dix ans me fait un peu moins rire aujourd’hui. Je ne suis pas un humoriste qui a envie de parler de politique, le quotidien nous plonge tellement dans ces univers-là ! Si je prends une place de spectacle c’est pour m’échapper de tout ça. Quand je vais dans un parc d’attraction, je ne me demande pas comment sont fabriquées les manèges ; je veux avoir peur, je veux rigoler…

Vous ne parlez pas de politique dans vos spectacles, mais en dehors, vous vous engagez sur les sujets qui vous touchent, comme l’homoparentalité ou encore la fin de vie.

Mais pour moi, ce sont des sujets sociétaux plutôt que politiques. La fin de vie, c’est important parce qu’on devrait tous se dire qu’on va mourir à un moment donné, et s’intéresser à comment on va mourir. Au travers de l’association a2main, je ne m’engage pas pour l’euthanasie, je m’engage pour qu’on accorde des moyens afin que les gens ne souffrent pas. J’ai envie que chacun puisse partir dignement, sans douleur, entouré de ceux qu’il aime, des choses de la vie qu’il aime. Dire aux gens que jusqu’à la fin, ils sont importants et considérés. Qu’on ne les mette pas dans des pièces où on ferme la porte, avec une infirmière qui vient une fois par jour. Je suis contre ça, je pense que la manière dont on accompagne les gens jusqu’à la fin en dit beaucoup sur comment, nous, on a envie d’être considérés à ces moments-là.

Lors de l’élection présidentielle de 2017, vous aviez appelé à voter pour Emmanuel Macron afin de faire barrage à Marine Le Pen au second tour. Le referiez-vous en 2022 ?

Très honnêtement, je n’ai aucun souvenir là-dessus, tout le monde m’en parle, c’est rigolo ! L’histoire nous a appris que les extrêmes n’ont jamais fait du bien ; je trouve qu’on a le droit de ne pas être d’accord, mais on doit quand même vivre ensemble. Je ne crois pas que dans une relation conflictuelle, il y ait un 100% raison et un 100% tort, je suis plutôt pour la modération. Les choses sont toujours plus compliquées. Donc j’appelle plutôt à ce qu’on vive ensemble, et je crois que les candidats qui représentent ce vivre ensemble ne sont pas des extrémistes, ni de droite, ni de gauche. Ça ne me fait pas rire ces sujets… Ce qui m’angoisse surtout en ce moment, c’est est-ce que les gens vont revenir dans les salles ou est-ce qu’ils ont peur encore de se dire « j’achète une place et je vais la garder trois ans dans mon sac à main »… Nous aussi, ça fait deux ans qu’on ne travaille pas et qu’on se pose des questions sur le sens de ce qu’on fait. Donc venez, on vous promet que la date va avoir lieu ! Spectacle familial, évidemment, on peut venir avec des enfants… Mes enfants l’ont vu et ils ont 6 ans. Je précise car souvent, les gens me posent la question !

Jarry. Titre samedi 12 février au Summum, 35€ à 38€

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