La Jolie Colo donne sa place à l'art

De la route qui mène à Autrans, un petit coup d'œil sur la droite suffit pour apercevoir les façades blanches de la Jolie Colo, installée en bordure de forêt. Certains Grenoblois, habitués des colonies de vacances, connaissent le lieu sous le nom de l'Echarlière. Cette ancienne ferme, reconvertie en centre de vacances dans les années 1950, s'invente aujourd'hui une nouvelle vie. Racheté par six porteurs de projets, tous originaires du Vercors, le lieu accueille depuis 2018 les bureaux et les ateliers de 14 entreprises aux profils très divers.

On y croise une entreprise spécialisée dans la fabrication de maquettes pour les musées, une productrice de plantes aromatiques, qui a installé son jardin à deux pas du bâtiment, un facteur de handpan, cet instrument à percussion fabriqué en acier, un photographe professionnel ou encore un ingénieur spécialisé dans les objets connectés. Le lieu abrite également le laboratoire des Pains du Vercors, une boulangerie artisanale et traditionnelle qui cartonne. Et quand vient la pause de midi, tout ce petit monde se retrouve dans les espaces communs, à commencer par la cuisine, où se nouent des liens qui débouchent parfois sur de nouvelles idées. « Le fait de se retrouver dans un même lieu, tous ensemble, ça favorise la motivation et la création dans nos activités respectives », se réjouit Pierre Hernicot, un des porteurs du projet.

Perrine Faillet (Peau) et Lison Desbrières tirent les ficelles

Au-delà de l'aspect économique et social du projet, la Jolie Colo possède également un volet culturel, qui s'incarne au travers de la salle de création nichée au cœur du bâtiment. La présence dans le collectif des porteurs de projet de Perrine Faillet (artiste multifacette également connue sous le nom de Peau) et de la metteuse en scène grenobloise Lison Desbrières, n'est pas pour rien dans l'existence de cet espace. « Nous avons vu tout de suite le potentiel de faire cohabiter les pratiques artisanales et artistiques dans le lieu, en profitant du savoir-faire des uns, en matière de fabrication ou de programmation, pour la création », explique Perrine Faillet.

Entièrement équipée en son et lumière, cette salle de 110 m2 accueille désormais des résidences d'artistes, qui viennent travailler sur leurs créations et qui peuvent également profiter des dortoirs mis à leur disposition. Cet automne, le danseur et chorégraphe hip-hop Noé Chapsal - dont la première du spectacle Isthme sera visible début février sur la scène de l'Heure Bleue - est notamment venu fignoler son oeuvre dans la salle, qui se pense avant tout comme un lieu de création. « Nous n'avons pas vocation à accueillir de la diffusion, car il existe déjà ce type de lieux dans le Vercors et nous voulons garder une certaine polyvalence, pour accueillir des profils différents », poursuit Perrine Faillet.

Entre deux résidences artistiques, la salle de création se transforme ainsi en salle de réunion pour les agriculteurs locaux, accueille des séminaires d'entreprises ou même le marché bio hebdomadaire, quand la météo complique son installation devant les portes du bâtiment. « Nous aimons cette idée d'un lieu multifonctions, qui puisse avoir un ancrage sur le territoire et être en interaction avec les acteurs locaux ».

Et si le lieu ne se destine pas à recevoir du public, une exception a été faite en décembre dernier, pendant le Festival international du film de montagne d'Autrans. La Jolie Colo a alors accueilli la création de deux ciné-concerts dans le cadre du festival, diffusé sur place auprès du public. Une façon de plus de s'ancrer sur ce territoire en le réinventant au quotidien.