Edito / L'édito du n°1184.
Pour être francs, on n’est pas spécialement fans de l’œuvre. Le dessin de Goin graffé (il y a des mois) sur un mur privé de la rue Hébert a fait parler de lui ces jours-ci. Il représente une femme portant un voile à rayures bleues, sur lequel est épinglée l’étoile jaune de David (sauf qu’elle se compose de deux carrés au lieu de deux triangles, on ignore si c’est délibéré), barrée du mot "muslim". La récupération facile du symbole ultrasensible qu’est l’étoile jaune pour dénoncer toutes sortes d’oppressions réelles ou supposées (on l’a même vue dans les manifs antivax… ça ose tout), est un peu trop récurrente, tout comme la polémique assurée qui suit. D’évidence, le sort actuel des musulmans ne peut être comparé ni de près ni de loin à la traque et à l’extermination des juifs dans les années 30 et 40. Maintenant, Goin se saisit de ce symbole non pas pour minimiser la Shoah, mais pour dénoncer l’islamophobie rampante de notre société. De moins en moins rampante d’ailleurs : Serge Klarsfeld lui-même disait à Mediapart il y a quelques jours : « Zemmour parle des musulmans comme on parlait des juifs à l’époque. » Là-dessus, le droitier Wauquiez, prompt à distribuer les bons et mauvais points culturels, a suspendu jusqu’à nouvel ordre la subvention de la Région au Street Art Fest de Grenoble (soit 18000 euros). Qui n’a pourtant pas grand-chose à voir avec toute cette histoire. Récupération, quand tu nous tiens…