Cinéma : les films qui sortent mercredi 14 septembre 2022

En salles / "Chronique d'une liaison passagère", "Le tigre qui s'invita pour le thé", "107 mothers", "Tout fout le camp", mais aussi "Coup de théâtre", "A propos de Joan" ou encore "Fire of love"...

À voir

★★★☆☆ Chronique d'une liaison passagère 

Charlotte et Simon, deux Parisiens quadra-quinqua, débutent une relation reposant sur le plaisir de partager ébats et moments complices, ainsi que sur la certitude de ne pas s’engager l’un vis-à-vis de l’autre – Simon étant par ailleurs marié. Mais au fil du temps et des expériences, leurs rapports évoluent… 

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Depuis Vénus et Fleur (2003), l’œuvre d’Emmanuel Mouret laboure en tous sens la carte du tendre, baguenaudant entre romances sentimentales et tragi-comédies adultérines, où l’issue est rarement joyeuse : le souvenir nostalgique d’une liaison et de ses exultations pèse généralement sur ses héros masculins défaits par la fatalité de la rupture – « il n’y a pas d’amour heureux », postulait Aragon. Comme son explicite titre l’indique, cet opus ne fait pas exception. Mais avant d’arriver à la séparation, il y a l’approche, les hésitations et les étreintes ; les promenades dans un Paris de beaux quartiers, de musées et de jardins publics, d’où s’envolent des dialogues précis-précieux bien ourlés, disséquant le désir, les convenances ; mettant vainement en équation le futur ou tentant de rationaliser ce qui échappe à tout le monde : les sentiments.

Dans cette Chronique…, Vincent Macaigne joue une partition ô combien connue mais avec quelle subtilité : des atermoiements à la souffrance, tout son corps hurle sa douleur ou sa jalousie quand les mots sont tus. Attachant parce que pathétique (et réciproquement), cet ours maladroit provoque devant nos yeux la fin de la passion qu’éprouve sa dulcinée à son endroit. Il faudrait être de pierre pour ne pas éprouver d’empathie à cet instant du film pour son désarroi à venir, ni pour admirer la mécanique ciselée de l’auteur. Entre Rohmer et Woody Allen, il y avait une place ténue à prendre ; elle est désormais bien pourvue par Mouret.

De Emmanuel Mouret (Fr., 1h40) avec Sandrine Kiberlain, Vincent Macaigne, Georgia Scalliet…


★★★☆☆ Le Tigre qui s'invita pour le thé 

« Dieu a inventé le chat pour que l'Homme ait un tigre à caresser chez lui », écrivait Victor Hugo. Les conteurs, quant à eux, continuent de faire appel à ses services : conjuguant la férocité des bêtes fauves à la grâce puissante des félins, le tigre ouvre à toutes les métaphores possibles en réjouissant l’œil – et en faisant frissonner les tout-petits. Pas étonnant, donc, que l’on trouve autant de courts métrages d’animation mettant en avant leur côté malicieux, glouton, capricieux… – au passage, des “qualités” dans lesquelles lesdits tout-petits peuvent aisément se retrouver.

Menant à l’adaptation de l’album jeunesse homonyme de Judith Kerr, Le Tigre qui s'invita pour le thé  (jolie réussite musicale, aux traits fins, aux mouvements souples et aux décors minimalistes), ce programme réunit donc quatre films ayant pour point commun d’abriter chacun au moins un tigre. On y revoit avec plaisir Tigres à la queue leu leu de Benoît Chieux, conte asiatique ayant concouru pour le César (un bien singulier éloge de la paresse), mais aussi deux adorables historiettes Le Tigre sur la table (avec son stop motion) ainsi que Quand je serai grand. Celui-ci nous fait à nouveau reconsidérer les chatons avec précaution : derrière leurs rayures, peut-être qu’ils sont persuadés d’être des tigres…

De Kariem Saleh, An Vrombaut, Benoît Chieux & Robin Shaw (All., G.-B., Fr., 41min) dès 3 ans…


★★★☆☆ 107 Mothers 

Une prison en Ukraine, où sont enfermées des criminelles – dont Lesya – enceintes et/ou mères jusqu’à ce que leur enfant atteigne l’âge de trois ans. Leur quotidien ; celui d’une des gardiennes Iryna, entre sa vie au travail et sa vie privée. Portrait de groupe avec femmes et quelques enfants…

Avec ses séquences posées montrant l’intimité des prisonnières, la liturgie du travail, leurs parloirs ou leurs interrogatoires entrecoupées de plans noirs marquant l’ellipse (et faisant écho au caviardage des courriers auquel s’astreint chaque jour Iryna), 107 Mothers assume une esthétique documentarisante : bien que fiction, le film revendique s’inspirer de la vie des détenues du centre pénitentiaire d’Odessa. Le choix de mêler à leur parcours celui d’une des garde-chiourme s’avère judicieux : de quel côté des barreaux qu’elles soient, ces femmes sont également entourées de murs. Et si Iryna peut sortir de l’établissement le soir, c’est pour trouver la réclusion de sa propre solitude ou l’enfer de sa mère tyrannique. Plus “sœur“ de détention que matonne, elle témoigne pour Lesya et son fils une bienveillance compréhensible assimilable à un sentiment maternel. Et si l’ultime plan, tourné sur l’emblématique escalier d’Odessa renvoie immanquablement Le Cuirassé Potemkine, il raccommode le souvenir de la mère et de l’enfant abattus : ici, l’amour remplace la mort. Un bémol : 107 Mothers ayant été tourné avant le conflit, qui sait ce qu’il peut rester de ce message d’espoir ?

De Péter Kerekes (Slov.-Tch.-Ukr., 1h35) avec Maryna Klimova…


À la rigueur

★★☆☆☆ Tout fout le camp 

Journaliste au Courrier Picard, Thomas est chargé de faire le portrait d’Usé, qui fut un folklorique candidat à l’élection municipale d’Amiens. Après une soirée à sympathiser, ils découvrent dans la rue le corps sans vie de Jojo, qui soudain ressuscite. Un étrange road movie s’improvise alors, non exempt d’absurdités… 

On ne sait jamais trop comment aborder le cinéma de Sébastien Betbeder, avec ses comédies initiatiques un brin erratiques – ce n’est pas pour rien qu’il apprécie tant le road movie. Si le burlesque et l’humour à froid ont souvent leur rond de serviette (comme Thomas Scimeca, son interprète fétiche), le rire n’est hélas pas souvent au rendez-vous. Et cela s’avère bien regrettable lorsque l’on signe des comédies, fussent-elles décalées, branchées, politiques ou teintées d’une vague ambition fantastique (comme ici). L’hybridation des genres ne constitue pas en soi un problème, loin s’en faut ; le côté bancal, l’enchaînement de situations poussif et l’incorporation d’une authentique “personnalité politique“ (très) folklorique donnent en revanche à la chose une apparence de salmigondis sympa pour les potes qui y ont participé mais sans grand intérêt pour les autres spectateurs.

De Sébastien Betbeder (Fr., 1h35) avec Thomas Scimeca, Jonathan Capdevielle, Léonie Dahan-Lamort…

 

Parmi les sorties du 14 septembre

À propos de Joan de Laurent Larivière

Coup de théâtre de Tom George

Fire of love de Sara Dosa

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