Politique culturelle / Pour compenser la hausse des impôts locaux décidée début 2023, la Ville de Grenoble a annoncé, parmi les mesures de son « bouclier social et climatique », la gratuité de ses musées (Muséum, musée Stendhal, musée de Grenoble). Seule l'exposition temporaire phare de la saison du musée de Grenoble restera payante, à un tarif plus élevé qu'aujourd'hui.
En écho à la hausse de 25% de la taxe foncière pour les Grenoblois en 2023, vous avez décidé de plusieurs mesures de compensation, dont la gratuité des musées.
La période que nous vivons, notamment la crise énergétique, génère une hausse très forte des coûts. On a 10 millions d'euros qui partent dans cette inflation ; il y a la hausse du point d'indice des fonctionnaires, dont nous nous réjouissons, mais qui aura tout de même des effets sur le budget. Face à cela, nous faisons le choix d'augmenter les impôts parce que nous souhaitons maintenir les services publics, continuer de les transformer. Et pour amplifier notre action, nous avons augmenté les impôts de manière plus importante que le simple montant de l'inflation, parce que nous souhaitons anticiper.
Cette hausse d'impôt, on le sait, concerne les propriétaires ; cet impôt n'est pas équitable, ni progressif. Nous le dénonçons depuis 2014 ; néanmoins c'est le seul levier que nous avons, donc nous l'utilisons. Nous sommes vigilants, d'une part, à amplifier notre action envers les foyers les plus fragiles – que ce soit à travers les aides du CCAS, la baisse des tarifs des cantines... – et d'autre part, nous avons aussi des mesures de soutien à la classe moyenne. Dans ce contexte-là, on a un ensemble de mesures que l'on met en œuvre, parmi lesquelles la baisse du prix de la cantine, de la tarification du conservatoire la gratuité des musées.
Nous n'avons pas besoin d'augmenter les impôts pour faire la gratuité des musées ; cela fait partie des actions qui sont cohérentes avec notre politique culturelle, à l'instar de la gratuité du Cabaret Frappé ou des bibliothèques. Les trois musées de Grenoble, ce sont des lieux de proximité. Le musée de Grenoble, ça fait plusieurs années qu'on le rend gratuit en période de canicule, parce que c'est un espace de fraîcheur. On avait la gratuité pour les moins de 26 ans, et le premier dimanche du mois ; cette logique s'amplifie en permettant que nos établissements culturels soient aussi des lieux du quotidien, de familiarité, tout au long de l'année.
Le prix d'entrée de l'exposition temporaire du musée de Grenoble, lui, augmentera fortement, jusqu'à 16€ au lieu des 8€ actuels...
Ce musée, c'est aussi un équipement culturel de renommée nationale. Les mesures qui permettent au quotidien la relation avec les arts pour les Grenoblois n'ont pas lieu d'être quand on parle du rayonnement, de l'attractivité touristique. C'est pourquoi il nous semble logique de maintenir une tarification pour l'exposition la plus importante chaque année, comme actuellement De la nature, dont on sait très bien que c'est l'occasion, pour beaucoup de non Grenoblois, de venir de façon exceptionnelle.
Ce qu'on cherche, c'est que ce soit vraiment un espace de la quotidienneté ; et ça, c'est la gratuité.
Ne craignez-vous pas que le montant du ticket d'entrée pour cette exposition soit un frein ?
Ce qu'on cherche, c'est que ce soit vraiment un espace de la quotidienneté ; et ça, c'est la gratuité. On a regardé, à travers la France, pour ce type de musées et d'expositions, on est sur des billets entre 12 et 18€. Notre intention, c'est de rester dans une moyenne. On est convaincus que quand on prend un billet de train depuis Lyon ou depuis Paris pour voir l'exposition du musée de Grenoble, ce n'est pas 12€ ou 15€ qui font qu'on ne viendra plus. Le tarif plein va être autour de 15€ à 16€, mais autour de 10€ ou 11€ pour les Grenoblois, et la gratuité comme elle existait jusqu'ici (moins de 26 ans, minimas sociaux, etc.). Quant à l'abonnement, il sera supprimé. L'intention, c'est de se dire qu'on peut y aller plusieurs fois, gratuitement. Le musée de Grenoble n'est pas une halle d'exposition, c'est un musée dont les collections permanentes ont largement de quoi attirer le public toute l'année. La gratuité est un outil pour arriver à cela, avec les actions de médiation, les visites, les événements, etc. Le projet scientifique, qui sera mis en œuvre par la prochaine direction, s'appuiera sur les outils existants pour construire un projet cohérent.
Comment les Grenoblois vont justifier qu'ils sont grenoblois, à l'entrée ?
On a plusieurs mois devant nous pour affiner le détail technique de comment ça va se passer. On le fait déjà dans d'autres services publics ; quand vous vous inscrivez au conservatoire, vous donnez votre justificatif de domicile et ça ne pose pas de problème. C'est à nous de travailler sur une mesure qui soit la plus efficace possible, ça peut être un justificatif montré à partir d'un smartphone... On va affiner pour que ce soit commode, facile.
Quand doit arriver le changement de direction ?
Le poste sera ouvert ce mois-ci. On est sur une procédure de recrutement assez longue. L'idée c'est, d'ici un an, d'avoir une nouvelle direction.
Aujourd'hui, le budget du musée de Grenoble, c'est 2, 4 millions d'euros, pour 650 000€ de recettes. L'enjeu, c'est qu'il en perde le moins possible.
Quelle est la proportion de visiteurs qui vient pour la collection permanente, et celle qui vient pour les expos temporaires ?
En gros, on sait qu'un peu plus de la moitié des visites du musée se font pendant les expos temporaires, dans lesquelles il n'y a qu'un tiers de Grenoblois. Ça veut dire que oui, on est sur un musée qui a cette reconnaissance très au-delà de Grenoble, et que cette reconnaissance est très largement assise sur la notoriété générée par les grandes expositions.
Quel impact anticipez-vous sur le budget du musée de Grenoble ?
Aujourd'hui, le budget du musée de Grenoble, c'est 2, 4 millions d'euros, pour 650 000€ de recettes. L'enjeu, c'est qu'il en perde le moins possible. L'idée, c'est de rester dans cet ordre avec la nouvelle tarification ; on verra ce qu'il en est.