Fast & Furious X : L'avant-dernier pour la route

En pariant sur un équipementier français à deux tours de la fin de la course, les producteurs de la série Fast & Furious X cherchaient-ils à relancer la machine sur une voie plus cartésienne ? Objectivement plus “réaliste” que le précédent (ce qui n’est pas difficile), ce pur bolide spectaculaire brûle de la gomme et ravage Rome. Mais c’est pour la famille…

On pensait en avoir fini avec les aventures de Dom Toretto, le musculeux conducteur de grosses cylindrées aux deux expressions (contraction de biceps, relâchement de triceps). Braqueur rangé des voitures — enfin, façon de parler, hein —, intervenant à l’occasion avec sa bande comme force d’appoint pour une agence gouvernementale, le garagiste en marcel n’aspirait qu’à couler des bielles tranquille avec sa compagne Letty et son fils Brian. Sauf que… Un fantôme du passé (sorti de Fast & Furious 5) surgit en la personne de Dante Reyes, fils du mafieux brésilien Hernan Reyes que Dom avait envoyé ad patres. Frappadingue au dernier degré, Dante est décidé à faire souffrir notre M. Propre par tous les moyens. En le faisant passer pour un terroriste aux yeux du monde, pourchasser par ses pairs, en le privant de ses équipiers, de sa femme, de son fils… Manquerait plus qu’il lui retire son permis !

« Une fois qu'on a passé les bornes, il n'y a plus de limites », s’amusait Alphonse Allais, qui eût certainement goûté l’outrance de la franchise bitumineuse. Laquelle, après avoir envoyé des bagnoles sur orbite, redescend sagement — c’est-à-dire pied au plancher des vaches — pour offrir un florilège de poursuites à crisper les orteils mais filmées avec une certaine maestria : la course à la bombe, à travers les rues de Rome, pourrait figurer telle quelle dans un Mission : Impossible. Louis Leterrier connaît son métier et dispose en sus de sacrés calibres pour accrocher l’asphalte. On ne parle pas ici des terribles engins mécaniques aux couleurs criardes et moteurs surgonflés, mais bien de sa distribution pléthorique, éclectique, hétéroclite : des comédiennes oscarisées toutes générations confondues (de Rita Moreno à Brie Larson !) côtoient la fine fleur de la viande sous créatine. L’accumulation de personnages et de têtes d’affiches pourrait être assommante, elle se révèle aussi réjouissante que les cascades impossibles exécutées avec une furia régressive participant de l’ambiance ludique du film.

Qui carbu… boira ?

L’éclatement du récit en une multitude de sous-intrigues s’avère même une bénédiction puisqu’elle permet de délaisser régulièrement Vin “paupière-tombante-et-poings-serrés” Diesel pour passer de longs moments avec le reste de la troupe (Charlize Theron, la geek perverse ; John Cena, le frérot pépère ; Brie Larson, la fille badass de M. Nobody…) et surtout le méchant de cet opus, campé avec une gourmandise nicholsonienne par Jason Momoa. Usant de tout ce qu’il est permis d’oser pour pousser son protagoniste au-delà de l’extravagance (poses façon Corcovado, tenues de patron de boîte de nuit disco, mimiques appuyées…), Momoa compose un boss final aussi crédible qu’improbable, donc à la mesure de cette saga. Après tout, n’y voit-on pas réapparaître des acteurs trépassés comme des personnages censés disparus ? Alors certes, même si Dom nous serine tous les quarts d’heure que, davantage qu’un plein d’essence sans taxe, « la famille c’est important » en mode « je s’appelle Groot », on ne rechignera pas à aller voir l’ultime volet de la série. Ne serait-ce que pour connaître la fin : Fast & Furious X s’achevant sur un cliffhanger, c’est comme tomber en panne sèche en ayant la station-service qui vous fait de l’œil…

★★★☆☆ Fast & Furious X de Louis Leterrier (É.-U., 2h21 Avec Vin Diesel, Michelle Rodriguez, Jason Momoa…

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