La permanente campagne

Dans la ville, les affiches ont fleuri et les discussions concernant cet événement grandissent : le journal Libération organise son premier Forum intitulé Vive la politique ! les 13, 14 et 15 septembre à la MC2 et à la Bifurk. Comment, pourquoi, quel intérêt d'un tel forum ? Séverine Delrieu


L'impression est persistante : la campagne ne semble plus être ce moment particulier de la politique, mais semble être devenue permanente. Les citoyens, passionnés par cette dernière, ont retrouvé le goût pour la chose politique, nouveauté au demeurant fort réjouissante. Se saisissant de «ce regain d'appétit pour la chose politique» - comme le formule Max Armanet, chargé du développement à Libé, coordinateur de ce forum -, le quotidien Libération mûrit l'idée, au lendemain du deuxième tour des présidentielles, d'organiser un forum “citoyen“.
À l'origine, le forum devait être axé sur la rénovation de la gauche.
Mais, effectivement soucieux d'être un espace de paroles pluralistes, le journal dégage trois grandes thématiques - Qu'est-ce que le Sarkozisme ?, La gauche est morte, Vive la gauche !, et La Culture peut-elle faire bouger le politique - thématiques sur lesquelles des personnalités politiques, journalistes, intellectuels a priori de tous bords pourront débattre.
La forme retenue sera celle du débat orienté par une question posée : les deux personnes ayant des opinions a priori antagonistes sur le sujet débattront pendant 90 minutes ; le dernier tiers du temps sera consacré aux questions de la salle. Au total, une cinquantaine de débats se dérouleront dans les différentes salles de la MC2.
Voilà pour le principe et la forme. En ce qui concerne les objectifs de Libération, Max Armanet explique que «leur souhait est de permettre au lecteur de Libé de se faire sa propre opinion sur la politique actuelle et de faire fonctionner ses neurones»…
En ce qui concerne les invités, beaucoup sont des ministres et des politiques de droite (la venue de Brice Hortefeux a soulevé une levée de bouclier chez certains collectifs qui organiseront une manifestation jeudi), des socialistes, des journalistes et intellectuels (sociologue, économiste...) plutôt médiatisés, quelques artistes, et quelques personnalités d'autres partis politiques de gauche.Des débats et de la comm'
Dans le fond - même si personne n'est dupe sur le fait que ce forum est une manière de promouvoir le titre de Libé qui lancera sa nouvelle formule dans un mois et pour la Ville de continuer «à repositionner la ville à la tête du débat social et politique dans le pays» selon les mots d'Olivier Noblecourt, Directeur de Cabinet de Michel Destot -, l'initiative de ces débats est intéressante.
En effet, ces débats déclencheront quoiqu'il se passe dans les salles, des discussions, à l'intérieur et à l'extérieur, des échanges - on espère – féconds.
Reste à savoir si ces discussions feront au final avancer un peu la société, et si la politique n'est pas devenu un miroir qui se regarde.
Néanmoins, si nous espérons assister à des débats intéressants, quelques questions peuvent affleurer - comme chez tout un chacun qui pense par lui-même (lecteur de Libé et d'autres journaux y compris).
D'abord, est-ce que la forme du duel est pertinente ? Pour Olivier Noblecourt, que nous avons contacté puisque la Ville de Grenoble, la Région et le Département sont les financeurs de ce premier forum Libé (à la Mairie le budget serait au-delà de 40 000 euros) : «le risque du duel, c'est de tomber dans le match de boxe, mais les tables rondes ne permettent pas d'aller au fond de sa pensée».
D'autre part, sommes-nous en présence d'un réel pluralisme ? Ne manque-t-il pas des voix issues de la société civile, d'organisme comme Attac, de personnalités d'autres partis de la gauche ? Max Armanet pense que «par rapport aux critères traditionnels, la majorité des intervenants serait plutôt à gauche. Mais en tout cas, cela n'a pas été notre critère principal pour inviter : nous voulions des gens qui ont quelque chose à dire sur la politique actuelle, en tout cas qui peuvent nous apporter des éclaircissements sur ce qui est en train de se faire».
Pour un forum, quelle place justement pour le citoyen ? «Il y aura les questions en fin de débat, et, sur proposition de la Mairie, La Bifurk est devenue partie prenante du forum. Elle propose des espaces citoyens, qu'on appelle des ateliers, dans lesquels il y aura une parole circulaire», explique le coordinateur du forum.Questions de culture
À la Bifurk (structure réunissant un collectif d'associations) qui a récemment connu des démissions au sein de son CA, la nouvelle présidente Carole Menduni insiste pour que ce lieu continue d'être «un lieu d'expression libre, ouvert à tous. Si Olivier Besancenot veut venir s'y exprimer, il le peut».
Si la Bifurk tente d'organiser des débats et rencontres en complément à ceux de la MC2 – on se réjouit d'ailleurs des ateliers organisés par La société des lecteurs de Libération autour de la crise de la presse (en ce qui concerne ce sujet une réunion aura lien avec d'autres collectifs le vendrdedi à 20h à la Maison du Toursime), ou encore des rencontres sur les nouvelles économies - le programme nous semble un peu pâlot et la culture peu ou pas assez questionnée.
Ce sera du côté de la MC2 que les débats concernant les questions de culture seront a priori les plus intéressants. Mais comme on ne peut présumer de rien, le rendez-vous est pris à la MC2 et à la Bifurk.Forum Libération. Du 13 au 15 sept, à la MC2 et à la Bifurk


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