Tu chanteras


Retour / Récemment, la Volksbühne, l'emblématique troupe berlinoise fut de retour sur la scène de la MC2. Et ce, avec une adaptation réalisée par le metteur en scène, Christoph Marthaler de la pièce Die Zehn Gebote (Les dix commandements) écrite en 1950 par l'auteur napolitain, Raffaele Viviani. Une rencontre opportune que celle de Viviani-Marthaler : Viviani fut chanteur dans les music-hall italiens avant que Mussolini ne les interdisent, et Marthaler étudia la musique. Ainsi, dans Die Zehn Gebote, l'univers de la voix à travers airs d'opéra, chants religieux (sur lequel s'ouvre sublimement le spectacle), canzonette, show divers et variés issus des varietà italiennes, est omniprésent : les personnages, des napolitains démunis, en marge, oubliés dans une Naples sublime car vieillissante et fabuleusement ressuscitée sur scène, pallient à leur existence désespérée par ces moments d'oubli et de communion incarnés par l'expression vocale profane ou sacré. Ces figures excentriques et chantantes se nourrissent d'ironie, d'humour noir, de sensualité, de grotesque, et de rages envers Dieu ou l'ordre moral -leurs résistances au dénuement-, puis, s'effondrent dans des dépressions inévitables. Le spectacle n'aurait pu être qu'une carte postale un rien datée d'une Naples traumatisée. Il n'en est rien. Le spectacle diffuse une étrangeté au pouvoir entêtant : la sensation d'un temps relâché, flottant, désintégré, à l'image d'une narration inexistante faisant place aux formules, aux phrases cinglantes, sortes de griffures pulsionnelles, procure à Ces dix commandements, une intemporalité particulière. De plus, l'utilisation de l'allemand ouvre les frontières : certes, on lit un parallèle avec l' Italie (Italie du Sud/ Nord, Allemagne Est/Ouest), mais plus largement, le propos parle des régions asséchées par le libéralisme sauvage, ce dernier symbolisé par les secousses du Vésuve, comme autant de coups, autant de mise à mort portés sur les plus précaires.SDLes dix commandements s'est joué à la MC2 du 17 au 19 avril


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Le serpent assume