Fragilité des mondes
publié dans Expos par le Mercredi 21 mars 2007
Installation / Derrière une parois recouverte d'affiches se dévoile un vaste espace : une ancienne station-service abandonnée. Un monde englouti. Caché, où les signes de présences sont révélées par les tags, grafs qui couvrent les murs, ou encore par une couverture, des bombes de graffeurs, des bouteilles, et lettres laissés... Autant d'objets, symboles d'existences invisibles, de parcours marginalisés. Les artistes associés de Local.Contemporain, n'ont presque rien touché sur le lieu. Sinon que grâce à des gestes de mise en scène précis, ils ont su, avec une infinie subtilité, finesse, sans négliger l'humour, attirer le regard mais surtout alerter nos consciences sur ces soubresauts du temps et de la vie. Tout au long de la découverte du lieu, plantes, animaux, insectes sont nommés, balises dessinant un nouveau chemin. Dans une baraquette, du sable a été déposé sur lequel des poupées, des bouchons de bières (une sorte d'ancienne décharge) surnagent. Des chaises longues sont dépliées dans cet espace pour écouter la composition saisissante de Laurent Grappe. Cette position est inconfortable : des paroles de chômeurs, celle d'un scientifique, d'un SDF et d'autres s'élèvent. Plus loin, les odeurs de certaines rue de Grenoble, ont été ramenées à nos narines dans ce lieu de l'oubli. Mais il y a encore moins visible. Dans un sombre sous-sol, des caillebotis surplombant une mare, nous mènent vers l'ultime trace de l'homme : une télévision allumée, devant laquelle un fauteuil, vestige d'une société de solitude, trône... Dire que naturellement l'endroit requiert une vraie poésie serait un comble et pourtant : dehors une grande flaque d'eau reflète le ciel, les branches s'emmêlent. La composition spatiale économe et respectueuse de Maryvonne Arnaud et Philippe Mouillon et les autres installations, interpellent sur le non-localisable, sur l'oublié, sur le devenu banal, trop quotidien : un foisonnement d'invisibles au cœur d'une micro-cité à l'intérieur de la grande. Puis notre regard se modifie. Durablement. sDLes Invisibles Installation Urbaine (Ancienne Station-service Place Bir-Hakeim) jusqu'au 23 mars de 13h à 18h