De la parole aux esprits

ORALITÉ ET CHAMANISME / Les autres films de la programmation sont regroupés autour de thématiques très liées entre elles : L'oralité au cinéma et Devenir chaman. SD/DG


Les films qui s'intéressent à la vie des peuples, impliquent de la part du réalisateur l'écoute attentive et la participation vivante avec les habitants. C'est ce que l'on ressent dans le très beau documentaire d'Antoine Chaudagne, Je prends ton mal tourné en 2004 dans le village arménien de Koty. Dans cette enclave de l'Azerbaïdjan, le cinéaste a réalisé des portraits d'hommes encore traumatisés par la guerre de 94 contre les Azéris. Autour de tablées, la parole n'en finit pas de convoquer le passé. Des récits, des souvenirs, des espoirs circulent et se transmettent. Un document très bref fixe la transmission avec force. C'est la berceuse chantée par un père Aka à son bébé, alors qu'une ribambelle de jeunes enfants l'accompagne. On ne pourra parler de tous les nombreux et divers documents proposés pour rendre compte de la transmission par l'oralité dans nos cultures et nos civilisations proches ou lointaines, mais beaucoup s'avèrent très précieux.Chamanisme et plus si affinités.Outre la projection du splendide Dead Man (voir encadré), la thématique du chamanisme sera essentiellement abordée au travers d'une série de quatre films d'horizons divers. Si l'on n'a pu voir les deux premiers (Ciguri-Tarahumaras 99 – Le dernier chaman, et Call for Grace), on vous recommande en revanche La quête du son, de Laetitia Merli, projeté en présence de la réalisatrice. Prolongement direct de Call for grace, le métrage, sous la forme d'un document ethnographique brut (pas de mise en scène, ni de construction documentaire), s'attache à suivre une nouvelle étape de l'initiation chamanique de Corinne, musicienne française partie rejoindre sa “formatrice” au fin fond de la Mongolie. Entre fabrication des accessoires rituels, et premières expériences dans un état de conscience modifié, elle confesse à la caméra ses ressentis, ses attentes, ses appréhensions… Avec une simplicité loin de toute emphase, qui rend son expérience d'autant plus captivante. S'il bénéficie d'un sujet en or (la quête de l'Inuit Charlie, parti à la rencontre d'un chaman shipibo en Amazonie dans le but de renouer avec les pratiques de ses propres ancêtres), le documentaire Le voyage de Charlie déçoit quant à lui un peu par la maladresse de sa construction (effets de mise en scène peu inspirés, voix-off souvent redondante…). À découvrir quand même pour les plus passionnés.


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Caméra occupée