Qu'avez-vous fait de nos idoles ?

Jeux vidéos / La collusion entre cinéma et jeux vidéos se fait de plus en plus marquée. En témoignent ces titres, sortis récemment sur les principaux supports (PS2, X-Box, PC), dont le but est plus de fournir un compLément aux fans hardcore que de prolonger efficacement l'aventure visuelle. FC


À l'époque de la sortie du film Silent Hill, on stigmatisait l'incapacité chronique d'Hollywood à donner une vie cinématographique à des franchises cultes dans la communauté vidéo-ludique. Mais que se passe-t-il lorsque l'émulation fonctionne dans l'autre sens ? Souvent le même effet de pure capitalisation d'un titre ancré dans l'inconscient collectif, en espérant que les clins d'œil appuyés à la légende effaceront les nombreuses scories du jeu. On commence par les pires : l'adaptation de la série 24 l'emporte haut la main. En dehors de la modélisation scrupuleuse des acteurs principaux (qui ont prêté leurs voix pour l'occase – sauf que quand on choisit bêtement de jouer en français, on subit une VF à se taper la tête contre les murs), 24 Heures Chrono le jeu vous embarque dans une intrigue linéaire au possible, truffée de cinématiques interminables et de mini-jeux aussi idiots que retors. Censé s'imposer comme le chaînon manquant entre les saisons 2 et 3, le produit ne fait que grossir de façon pas vraiment reluisante les défauts de la série. Autre trahison, et pas des moindres, le jeu Reservoir Dogs propose de reconstituer les ellipses du film. Vous pensiez que le premier chef-d'œuvre de Tarantino était un peu mou du genou ? Rassurez-vous, les concepteurs ont tout fait pour vous donner l'impression d'être dans une production Bruckheimer. Alternance entre courses-poursuites et démastiquages à la Medal of Honor (!), Reservoir Dogs est un jeu ultra limité, et ne sort jamais du script préétabli par les concepteurs (sous peine de bugs encore plus corsés). L'avalanche de vannes pourries en voix-off (censées rappeler la gouaille tarantinesque) oblige de plus à couper le son...Rockstar feverUn cran au-dessus en termes d'intensité narrative, Le Parrain se fait fort d'un respect à tout crin du premier film de Coppola. Mais cette déférence transparaît surtout dans les longues cinématiques, et pas vraiment dans les phases de jeu, décalque rétro (et restreint) de la référence ultime Grand Theft Auto (le caractère laborieux des incessantes sessions de combat finissant par lasser assez vite). Marchant dans les mêmes traces du jeu culte qui fit la réputation de l'éditeur Rockstar Games, Scarface the World is Yours parvient à entretenir l'illusion quelques heures, en vous faisant commencer là où finissait le film de Brian De Palma : vous devez survivre à l'assaut de votre villa par les hommes de Sosa, puis reconstituer votre empire. Mais le caractère immersif de cette première mission est mis à mal dès son accomplissement, le reste n'offrant qu'une version encore une fois très limitée de GTA. Et comme par hasard, ce sont les gars de Rockstar Games qui nous ont offert en début d'année le jeu le plus fidèle à son modèle ciné : The Warriors reprend l'ambiance et l'esthétiques bourrines des Guerriers de la Nuit, dans un jeu certes basique, mais ô combien jouissif. Bilan : dans les deux industries, le respect artistique des spectateurs / gamers prévaut, et l'originalité se fait une denrée rare.


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