Le retour aux mots

théâtre / Pour sa neuvième édition, l'Hommage à l'Acteur se fixe pour objectif de revenir au cœur d'une préoccupation majeure des artistes invités : le texte. Entretien avec Michel Belletante, maître d'œuvre de la manifestation. Propos recueillis par François Cau


Qu'est-ce qui fait la spécificité de cette édition ? Michel Belletante : Je crois que cette année j'ai voulu revenir à l'essentiel, à cette envie des comédiens par rapport au texte. Je suis passé, entre la quatrième et la cinquième édition, par des achats de spectacles tout faits, des trucs déjà en boîte qui jouaient sur la renommée du comédien ; c'est bien aussi, ça fait venir un public, ça fidélise. Mais dans l'esprit, j'aime bien que le comédien défende un texte, comme Yann Collette, ou comme Anne Alvaro l'année dernière. Ce sont des choses complètement gratuites, des spectacles qu'ils ne sont même pas sûrs de reprendre plus tard. Ils ont l'opportunité de faire quelque chose qu'ils veulent faire depuis longtemps, et donc ils le font. Au niveau du sens ça me ravit.Vous mettez en scène Lucile Jourdan dans Les Monologues du Vagin d'Eve Ensler…C'était difficile pour moi. On a travaillé 15 premiers jours, on a fait un filage et quelque chose ne marchait pas, qui venait du fait qu'on avait réussi à faire de bonnes facettes de personnages, mais bon, du coup on aurait pu faire ça avec le bottin ou les Lettres de mon Moulin… Le gros travail sur les 15 derniers jours a été de trouver l'angle d'attaque pour un texte militant. Il y a le pari de rajouter cette couche-là sur la première, de retrouver l'adresse directe aux femmes. Je suis très touché par ce texte, il me parle énormément, je suis en accord très profond avec ce qu'il dit. Je suis persuadé que ce discours peut toucher des femmes dans la salle, et c'est ça que je ne veux pas louper. Quels seront vos autres temps forts ?Il y a tout d'abord Stéphane Naigeon sur un texte d'Antonin Artaud. Je connais l'acteur, c'est une bête, une force de la nature, entre animalité et intelligence matoise sur un plateau, un cocktail très détonant. Ça va marquer le spectateur. Il y a ensuite le Frida Kahlo de Véro Dahuron, j'adore cette comédienne, toute en finesse, solaire, avec une énergie que j'aime voir chez les comédiens. Et puis il ne faut pas oublier Nasser Djemaï, disons que c'est LE truc le plus consensuel aujourd'hui au niveau de la profession, il joue au Théâtre de la Ville à Paris, il a fait un tabac à Avignon en juillet dernier. J'y suis allé par la rumeur des professionnels, et j'ai découvert un très beau parcours, une très belle histoire. Cette année, vous êtes dans des formes de spectacles plus brutes.Je sais pas si c'est vraiment le cas. C'est plus une façon de confronter le public à de vraies interventions de comédiens, de revenir à ce comédien qui, quand il défend un texte, le défend pour l'autre, on est vraiment dans une implication du regard du spectateur. C'est peut-être un plus râpeux, le spectateur sera plus brassé. Hommage à l'acteurjusqu'au 19 octobre, à l'Amphithéâtre de Pont-de-Claix


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