Retour vers le passé


Danse / Ancienne danseuse d'Anne Teresa de Keersmaeker, la chorégraphe Michèle Anne de Mey créa en 1990 le spectacle qui fit la renommée de sa compagnie. Sinfonia Eroïca (surnom communément donné à la Symphonie n°3 de Beethoven par le compositeur en personne) est une pièce pour neuf danseurs, une création ludique basée sur l'interaction entre des thèmes classiques majestueux (signés Mozart et Beethoven, agrémentés d'un court interlude illustré par le Foxy Lady d'Hendrix) et leur expression dansée la plus exaltée possible. Une succession de tableaux où les interprètes chahutent de concert, font les grands enfants avant de se focaliser sur une joute ou un échange passionnel. Seize ans plus tard, Michèle Anne de Mey revient sur la création la plus fameuse, a priori sans en bouleverser les fondements. Le dispositif scénique est le même, les variations chorégraphiques sont globalement ténues, seuls la distribution et les costumes ont subi un lifting notable. Et pourtant, les outrages du temps ont marqué la création de leur sceau. Isolément, chaque tableau recèle moult instants de grâce perdue puis retrouvée, de bonheur d'exécution, mais inscrits dans la globalité, ces belles lueurs perdent de leur éclat. Les jeux lascifs, cruels et survoltés des danseurs perdent sur la longueur de leur efficacité, les interprètes se jouent d'une partition dont le spectateur est peu à peu exclu. L'érotisme trouble a laissé place à une froide mécanique des sentiments - et ce en dépit du plaisir manifeste des danseurs sur scène. Si tel est le propos de Michèle Anne de Mey – démontrer l'évolution des relations affectives vers leur seul rapport de domination, avec comme clé de voûte de cette construction émotionnelle l'enfance -, alors le pari est pour partie réussi. FCSinfonia Eroïcaven 8 fév à 20h, à la Rampe


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