Virage classique

À contre-courant de sa politique de programmation usuelle, Michel Belletante, le directeur de l'Amphithéâtre de Pont-de-Claix, a décidé de scinder sa saison en deux parties et entend notamment redonner du lustre à des auteurs dont la voix s'est raréfiée sur les planches. François Cau


Cette saison sera décisive à plus d'un titre pour l'actuel boss de l'Amphithéâtre. Avec l'arrivée d'une nouvelle municipalité désireuse d'inscrire l'établissement dans «un ensemble que la ville souhaite désormais bâtir», où Pont-de-Claix serait envisagé comme un “tout culturel” dans lequel les structures municipales fonctionneraient en une émulation restant à définir précisément (pour l'instant, la ville a mandaté Michel Dibilio, de la compagnie Takiya Tokaya, pour réfléchir à la question). Avec l'issue de son contrat fin août 2010, dont le renouvellement dépendra vraisemblablement des attentes précitées. Enfin, avec cette réorientation de programmation voulue par ses soins. Jusqu'à la mi-décembre, le lieu accueillera son lot “habituel” de créateurs de formes scéniques atypiques, des vertiges chorégraphiques de la compagnie 47-49 de François Veyrunes (Suites ardentes, le vendredi 28 novembre) aux circonvolutions mélodiques hautes perchées de Cédric Marchal et François Thollet (Oskar et Viktor, le mardi 16 décembre) en passant par les coups de cœur subversifs (le très impatiemment attendu Bloody Niggers mis en scène par Jacques Delcuvellerie, ambitieuse fresque brossant à contre-poil toutes les oppressions de l'homme par l'homme, des croisades à la colonisation), ce premier semestre honore une nouvelle fois la soif de découverte de l'Amphithéâtre, tout comme son goût pour des auteurs contemporains à l'écriture saillante, comme Jean-Pierre Siméon ou encore Xavier Durringer. Arrive ensuite le mois de janvier, et son cortège de bouleversements artistiques.Dépoussiérages
La deuxième partie de saison se focalisera en effet quasi intégralement sur des textes du répertoire classique. Un choix assumé avec jusqu'au-boutisme par Michel Belletante (qui mettra lui-même la main à la pâte avec un Barbier de Séville et une Iphigénie, respectivement à la mi-janvier et fin avril), dans un désir prononcé de revenir aux fondamentaux, selon lui de plus en plus oubliés, de la discipline théâtrale. Pestant contre la supposée obsolescence de ces textes, notre homme souhaite réaffirmer son statut de passeur culturel, inscrire avec encore plus de poids son rôle pédagogique dans la vie de la cité. Loin de se poser en donneur de leçons pour autant, Michel Belletante fait la part belle aux (re)découvertes de trésors littéraires, tout en démontrant leur contemporanéité, comme peut en témoigner sa reprise de la sublime version d'En attendant le songe d'Irina Brook (fin février), joyau de post-modernisme légitimant quasi à lui seul ce virage thématique. S'il demeure encore quelques réfractaires, ils pourront se régaler du subtil mélange entre modernité et charme désuet offert par la compagnie La Cordonnerie avec leur Barbe Bleue (les 28 et 29 mai)…www.amphitheatre-pontdeclaix.com


<< article précédent
La claque Langhoff