Hellboy II, les légions d'or maudites

de Guillermo Del Toro (EU, 1h59) avec Ron Perlman, Selma Blair, Doug Jones…


Le prologue de ce deuxième Hellboy est au bas mot génial : encore gamin, le futur super-héros se laisse conter l'histoire qui deviendra l'argument de cette nouvelle aventure. Pour illustrer cette fable d'héroïc fantasy inspirée du Seigneur des anneaux, Guillermo Del Toro a une idée magnifique : la reconstituer avec des pantins de bois, virtuels mais à l'ancienne, et non avec le numérique photoréaliste d'un Peter Jackson. C'est une magistrale déclaration d'intention : par-delà la technologie, il faut faire vivre l'imaginaire pour garder la part d'enfance en chacun de nous. À tous ceux qui pensaient que le réalisateur du Labyrinthe de Pan s'acquittait là d'une commande commerciale, il envoie ainsi la plus personnelle des réponses. Des années plus tard, Hellboy est devenu un super-héros mal embouché, frimeur et glandeur. Mais Hellboy a depuis le premier volet une copine… Del Toro utilise alors son héros pour peindre un autoportrait en geek maladroit, incapable de penser à autre chose qu'à lui-même. Cette histoire d'amour contrariée irrigue par ailleurs un blockbuster sidérant d'inventivité. La perfection des plans, le sens des couleurs, la précision d'un montage qui ne confond jamais rythme et épilepsie, surclassent tous les divertissements actuels. Mais l'intelligence d'Hellboy II n'est pas que graphique… Car Del Toro complexifie avec talent les enjeux et dépasse le traditionnel affrontement bien et mal, notamment grâce à un «méchant» cousin de celui de Blade II, qui sème le chaos pour entraîner une prise de conscience du désastre écologique à venir. Réussite majeure du cinéma de super-héros, Hellboy II fait voler en éclats les barrières entre mainstream et film d'auteur, imposant son cinéaste comme un des meilleurs en activité.

Christophe Chabert


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