Ne vous fiez pas au visuel trompeur de la pochette de Disque mineur, fin de règne animal, le nouvel opus bientôt disponible des Frères Nubuck. Jamais auparavant dans leur discographie commune, Rémy Chante et Chris Gontard n'ont fait montre d'une aussi belle complémentarité artistique. Si jusqu'à présent, les transitions vocales entre les deux lascars s'opéraient parfois avec violence, pour ne pas dire barbarie, leur émulation fait ici des merveilles, tout comme l'ensemble de la production. Le morceau introductif de l'album, le roboratif In meiner garage (wie Ribery), annonce d'emblée l'ambitieux saut qualitatif. Un aguichant gimmick saxophonique, bientôt soutenu par l'ensemble de la formation, introduit un texte superbement vicelard sur la réappropriation médiatique des freaks, dont l'imparable refrain sera accompagné d'une vertigineuse montée pour guitare. S'ensuivent la déflagration tubesque d'un quotidien bobo puant l'amertume (Preuves de jeunesse), une ballade mortifère où les deux MCs joignent leurs efforts (Déterrer les Zimmerman), une irrésistible comptine pop où l'on s'extasie sur les joies du concubinage à grands coups de «C'est beau un couple qui fait l'amour» (Pour la survie de l'espèce), une instru diaphane (Sous le signe du tigre), la déchéance d'un zicos fat prenant en pleine gueule sa compromission artistique - «tu dis qu'avec ton premier groupe t'as fait une tournée avec des belges potes de dEUS (…) tu menais les managers et les DA à la baguette, c'était la bonne époque, putain t'étais rock» (L'œil de Moscou)… Les Frères Nubuck ont une façon unique d'enrober le désenchantement du quotidien de mélodies idoines et de textes fiers de leur poésie tour à tour crasseuse et illuminée. Leurs compositions, numéros de haute voltige explorant leurs propres faisceaux pop-rock barrés, s'accordent avec une frénésie textuelle à même de filer le tournis à qui aurait la bonne idée de s'y perdre.
FC
Les Frères Nubuck
Disque mineur, fin de règne animal (SBHRR)
disponible début 2009