En six...

Résumer les Rencontres du jeune théâtre européen en six mots, une gageure... Mais comme au PB on aime bien jouer à Pyramide, on s'y est attelés, avec l'aide considérable de Fernand Garnier, responsable du Crearc. Propos recueillis par AM.


Les origines
« En 1984, le Théâtre action - Créarc, structure dirigée alors par Renata Scant, a créé le Festival de théâtre européen. On a décidé, en 1989, de monter en convergence avec ce festival les Rencontres du jeune théâtre européen ; ces deux manifestations fonctionnant en synergie. Au fil des années, les Rencontres se sont développées, ont pris une importance de plus en plus considérable. Mais en 2004, le Festival de théâtre européen a disparu. Les Rencontres ont quant à elles poursuivi leur chemin. »L'Europe
« Au départ, on s'est centrés sur l'Europe, avec en même temps l'idée d'une Europe ouverte sur le monde. On a invité dès la première année des groupes venus d'Algérie, ou encore de Pologne en essayant à l'époque d'ouvrir cette Union européenne sur son versant Est (même si on avait rencontré des problèmes considérables vu le contexte de l'époque !). Cette année, on a ainsi quatorze pays de l'UE représentés, mais aussi des Russes, des Burkinabès... »Le public
« Dès les débuts du Créarc en 1972, on était dans une volonté de rencontrer le "non public", celui qui ne va pas au théâtre parce qu'il estime que ça ne le concerne pas. On a ainsi mis en place tout un travail en direction des enfants, des apprentis, des jeunes exclus des quartiers, des immigrés... On retrouve ici l'idée fondamentale que les gens vont au théâtre, mais aussi font le théâtre, en étant à la fois spectateur et acteur. Car ces Rencontres sont plus qu'un simple festival. On demande aux artistes de rester pendant les dix jours et de participer à d'autres activités, en particulier des ateliers qui sont une véritable école internationale du théâtre. On a des metteurs en scène italiens, roumains, espagnols... qui partagent leur savoir faire avec les jeunes comédiens, et qui les font travailler dans la perspective d'un spectacle de clôture rassemblant l'ensemble des participants – cette année Le Conte d'hiver de Shakespeare. Ça devient alors un point de départ pour des collaborations futures entre les compagnies après les Rencontres. »L'ouverture
« Avec les spectacles de rue [six sur vingt cette année, NDLR], on va vers un public qui ne s'attend pas forcément à rencontrer le théâtre. Parallèlement, sur les spectacles en salle, on mène une politique de gratuité délibérée : l'accès à tous les spectacles est libre, dans la limite des places disponibles évidemment. On rejoint ainsi quelque chose de très ancien, avec la vision que les Grecs avaient du théâtre. À Athènes, c'était la cité qui payait les frais de création et offrait le théâtre à la population parce qu'elle considérait que la représentation théâtrale faisait partie de l'éducation citoyenne. Ces Rencontres sont donc l'occasion pour les citoyens de Grenoble et d'ailleurs d'approfondir leur vision de l'Europe, de l'international, du théâtre... »La programmation
« On essaie de tenir compte d'une pluralité de paramètres, notamment la diversités des pays européens représentés et la venue de jeunes extérieurs à l'Europe pour qu'on se souvienne que l'Afrique ou la Russie, par exemple, existent aussi ! Mais il y a toujours le problème de l'argent, les troupes devant payer leur transports. Sur l'élaboration de la programmation, les centres culturels français nous envoient des artistes, comme le réseau des festivals francophones ou celui du jeune théâtre européen que nous avons créé dans une trentaine de pays différents. Les artistes nous contactent aussi beaucoup par Internet. Au final, il y a une part de prise de risques importante comme on se base uniquement sur des projets, d'où l'idée d'avoir chaque années quelques troupes que l'on connait déjà, qui sont déjà venues les éditions précédentes. »La décentralisation
« Toute l'histoire de la décentralisation théâtrale française est née de ce qui s'est fait au sortir de la seconde guerre mondiale, dans la suite du programme du Conseil national de la Résistance qui était de diffuser le théâtre ailleurs qu'à Paris. La première étape a été la création du Théâtre national populaire de Jean Vilar qui lui même a créé le Festival d'Avignon – au départ un tout petit festival artisanal – avec cette idée de démocratisation culturelle, d'apporter le théâtre au peuple. La deuxième période est la création des Maisons de la culture par André Malraux, qui donne des moyens supplémentaires à cette idée. Il ne s'agit plus seulement d'avoir des centres dramatiques nationaux, mais d'avoir aussi de grands équipements culturels en région qui soient des lieux de rencontre, de dialogue, d'élaboration... On s'inscrit pleinement dans cette démarche avec le Théâtre action. »


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