«Un mélange entre fantastique et brutalité»

THÉÂTRE. La Fabbrica évoque le destin de plusieurs générations d'ouvriers sur fond de récit fabuleux. Après avoir lu le texte (très fort), on a demandé au metteur en scène Charles Trodjman de nous en dire un peu plus. Morceaux choisis. Propos recueillis par Aurélien Martinez


Ascanio Celestini (l'auteur)
« J'ai été très surpris quand je l'ai vu à Rome pour la première fois : les gens venaient le saluer à la terrasse du café, lui demander des autographes… J'ai constaté à quel point il était connu pour son engagement à la télévision italienne – sur la seule chaîne qui ne soit pas véritablement berlusconienne – où il fait des chroniques très acides ; mais aussi pour ses activités de chanteur, réalisateur, écrivain, homme de théâtre… Tout ça alors qu'il n'a que trente-huit ans ! Celestini est l'un des héros du théâtre de narration en Italie, avec souvent un acteur sans décor et sans costume qui vient raconter l'histoire profonde de l'Italie ; tradition que l'on n'a pas en France. »Le texte
« J'ai rarement lu de textes où les questions politiques et sociales liées à l'industrie et à la classe ouvrière croisaient à ce point le fabuleux. J'ai été très séduit par ce mélange entre fantastique et brutalité. Celestini raconte une histoire de l'Italie de façon allégorique, tout en abordant la question de la désindustrialisation – une question d'ailleurs qui ne touche pas seulement l'Italie mais toute l'Europe – sans être véritablement partisan. Même si évidemment, on sent qu'il n'a pas choisi le camp des patrons ! Il raconte cela comme une histoire qui n'existera plus, mais sans volonté revendicative : il parle simplement du présent, du travail, de la souffrance au travail, voire de la mort au travail. Bien sûr, son texte peut avoir des ricochets sur les ouvriers contaminés pas l'amiante, ceux qui meurent à France Télécom, ceux dont les usines disparaissent… »La mise en scène
« Suite à ma demande, Celestini a accepté la division du monologue en deux, pour un homme et une femme. Je lui ai aussi dit, compte tenu de ce que j'avais décelé intuitivement dans le texte – cette trace du fabuleux, mais aussi du sacré –, que j'aimerais bien ajouter des chants, en pensant évidemment à Giovanna Marini [une figure de la chanson populaire italienne NDLR]. Il était emballé ! Je l'ai rencontrée le lendemain, elle m'a tout de suite dit oui, et on a commencé le travail avec deux acteurs et le trio aligné sur sa voix, avec des chansons héritées des chants polyphoniques italiens et d'autres plus religieux. Vous avez d'ailleurs la chance que Giovanna Marini vienne à Grenoble, elle ne fera pas toutes les villes de la tournée vu son âge. »LA FABBRICA
Du mardi 17 au vendredi 20 novembre, à la MC2


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