La longue nuit de Lavaudant


Pour son retour dans sa ville natale et dans la maison de la culture grenobloise dont il a dirigé le centre national dramatique dans les années 80, Georges Lavaudant amène avec lui une atmosphère mexicaine. Pour explorer plus encore ce pays qui lui est cher, Lavaudant a choisi d'adapter un texte bavard et peu joué de Tennessee Williams, La Nuit de l'iguane.

Tcheky Karyo est un pasteur américain répudié pour fornication et blasphème et qui s'est transformé en guide de voyages de seconde zone. Il traine son groupe de touristes jusqu'au petit hôtel Costa Verde tenu par une de ses amies. Mais il se traine surtout lui-même. L'écrivain américain a créé un personnage trop à l'étroit dans son corps et dans la fonction sociale qu'il s'était assignée, coincé entre son envie d'assouvir ses plaisirs sur quelques femmes de passage et sa volonté de réussir ce métier de pasteur peu compatible avec ses désirs. Pour suggérer encore plus le cul de sac dans lequel se débat mollement Shannon, le fidèle scénographe de Lavaudant, Jean-Pierre Vergier, a construit un décor grandiose fait d'agaves et cactus démesurément grands et piquants. Cette image splendide est cependant trop immobile pour porter le spectacle durant deux heures. Les personnages, comme fatigués d'avoir à se battre contre leur vie insipide, se cognent les uns aux autres, se parlent mais s'écoutent peu et se figent dans leur solitude. Seul cassure de rythme dans cette après-midi au bout du monde : un improbable défilé de vacanciers nazis affublés de maillot de bains en coquillage, palmes et bouée géante gonflables rappelant de manière presque anecdotique que l'action se situe dans les années 1940, en pleine guerre sur l'autre continent.

Nadja Pobel

La Nuit de l'iguane
du 8 au 12 déc à la MC2


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