Men : queer as folk

Le Tigre n'est pas mort ! Pour le festival Les Femmes s'en mêlent, on découvrira ainsi Men, émanation du feu trio d'électro-punk américain. Dire qu'on mise tout sur cette soirée queer à souhait est un doux euphémisme.


« We want some options / There is a way / Why don't you adopt / Borrow someone's cock / Call up the bank / We all scream now ! » Les Américaines de Men nous préviennent sur leur titre phare qu'est Credit Card Babie$ : elles vont être obligées d'aller voir les mecs pour faire des gosses – « I'm gonna fuck my friend (x3) to have a little tiny baby » –, alors que franchement, elles s'en passeraient bien… Émanation du cultissime groupe d'électro-punk féministe Le Tigre (en anglais, on appelle ça un side project – oh yeah !), Men est sans conteste la bizarrerie la plus surprenante et agréable nichée au cœur d'un festival des Femmes s'en mêlent plus porté sur les guitares sèches que sur les beat électroniques tout en gouaille. Voguant sans Kathleen Hanna (fondatrice du Tigre, et ancienne membre du riot grrrl, mouvement musical et féministe du début des années 1990), JD Samson et Johanna Fateman ont repris du service depuis 2007 sous l'appellation testostéronée de Men : voilà qui plante le décor.

Pour être tout à fait exhaustif, il faudrait préciser que JD Samson fut à l'origine en 2007 du projet Hirsute avec l'auteur Emily Roysdon et deux membres de The Ballet, groupe d'indie-pop de Brooklyn. Tout ce petit monde fusionne en 2009, Johanna Fateman prend du recul (ne restant plus que dans l'ombre), et Men version 2010 devient un collectif à géométrie variable avec sur scène JD Samson du Tigre accompagnée de Ginger Brooks Takahashi et Mickael O'Neill (wouh, un garçon !) de The Ballet. Voilà pour les bases nécessaires à toute bonne compréhension.

Pâté, Vierge et Chiennes de garde

Men est donc une formation estampillée queer nous faisant d'avance rugir de plaisir (jeu de mots facile, on l'accorde), qui a déjà à son actif les premières parties des délirantes Gossip et Peaches. Et la musique dans tout ça ? Nourrie aux guitares rock saturées, elle sonne electroclash et post-punk à bloc, avec un côté pop et dance assumé crânement. Off our backs, disponible sur leur myspace (pas d'album pour le moment, mais seulement des EP), est ainsi une tuerie pour dancefloor, avec refrain final criard littéralement jouissif – « I'm a tease, we're flipping can't you see ?! ». Il y a aussi le phénoménal Credit Card Babie$, évoqué en ouverture de ce papier, aux paroles militantes annonciatrices de la révolution Men : « Big plans for a newborn gay creation ! »

Plus tigresses que Chiennes de garde, les Men envoient le pâté sans se soucier de comment il sera reçu – et tant mieux : on attend donc leur concert-performance comme la Vierge, en espérant que nos nouvelles meilleures amies sauront retourner la Bobine comme il se doit. Ça se pourrait bien, le groupe misant pleinement « sur l'énergie du spectacle vivant et le potentiel radical de la musique dansante » lors de ses shows.

Hors-d'œuvre

Forcément, les musiciens de Men ne seront pas les seuls à se produire sur le plateau de la Bobine. On retrouvera aussi la Franco-américaine Tender Forever, qui s'est fait connaître par des reprises au ukulélé efficaces de Cher ou de Justin Timberlake, et que tout le monde présente comme la seule française signée sur le célèbre label américain K Records, histoire d'en foutre plein la vue. Et il y a de quoi : pop lo-fi bidouillée et rythmes syncopés, portés par une voix chaude qui fait des merveilles sur certains titres, Tender Forever est un petit bijou musical plus qu'agréable.

Déjà venue au Ciel il y a deux ans (pour remplacer The Do), la Bordelaise émigrée aux États-Unis semble comme prendre toute son essence sur scène, au vu des vidéos live trouvées ici et là sur le web. Seule derrière ses petites machines, comme la maîtresse d'un univers musical bricolé mais solide. Et pour compléter le plateau, on pourra assister en début de soirée au live des bébés rockeuses de Décibelles, trio local assumant son côté punk sans retenue (ça hurle dis donc !). Tout un programme pour une soirée à marquer – on l'espère – d'une pierre blanche.

MEN + Tender Forever + Decibelles
Mercredi 31 mars à partir de 20h30, à la Bobine


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