Le Dernier maître de l'air

De M. Night Shyamalan (ÉU, 1h43) avec Noah Ringer, Dev Patel, Jackson Rathbone…


Avec une frénésie qui confine à l'hystérie pure et simple, Le Dernier maître de l'air nous jette à la figure dès ses premières secondes son univers visuel, les clés de sa mythologie et leur application concrète. Cet empressement ressemble à un aveu : M. Night Shyamalan, en acceptant de tourner ce lourd blockbuster inspiré d'une série animée lorgnant ouvertement sur l'héritage des mangas japonais, a flanqué aux orties tout ce qui jusque-là définissait son style. À savoir, un savant mélange entre une durée flottante et un espace qui, même replié sur la subjectivité de quelques personnages ordinaires, finissait par s'ouvrir à des mondes infinis. Le Dernier maître de l'air, à l'inverse, ne crée jamais de lien intime à l'écran entre ses héros et l'univers dans lequel ils évoluent. Ce devrait pourtant être le sujet du film : la lutte entre des enfants ayant la capacité de contrôler des éléments naturels. Malgré la débauche de moyens et d'effets spéciaux, ce sont les dialogues qui sont chargés, en désespoir de cause, d'éclairer l'action. Le problème, c'est que ceux-ci sont particulièrement idiots et grandiloquents, jamais incarnés par des comédiens transparents, eux-mêmes perdus dans les fonds verts et les effets numériques. Le naufrage va jusqu'à la tentative de «gonfler» sur le tard le film en 3D. Il faut le dire : celle-ci ne sert strictement à rien, réduite à créer une vague profondeur dans les plans, à peine perceptible la plupart du temps. Shyamalan, qui n'a jamais été un réalisateur graphique, se révèle en la matière aussi inefficace que Tim Burton dans Alice, avec une mise en scène impersonnelle à peine soulignée par quelques effets de signature. Celui qu'on a abusivement surnommé le nouveau Spielberg montre ici tout l'écart qui le sépare du maître.
Christophe Chabert


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