Contes de l'âge d'or

De Ioana Uricaru, Hanno Höffer, Cristian Mungiu… (Roumanie, 1h28) avec Diana Cavaliotti, Vlad Ivanov…


Présenté à Cannes en un seul film de 2h20, puis coupé en deux pour sa sortie en salles françaises, "Contes de l'âge d'or" voit son deuxième volet (avec un sketch supplémentaire et inédit, "La Fille au dindon") débarquer discrètement en plein été… Autant dire en mission suicide, d'autant plus que cette deuxième fournée est moins immédiatement séduisante que la première, qui se concentrait sur les comédies pures du lot. Ici, le ton est plus doux-amer et les «légendes» racontent surtout d'étranges histoires d'amour. Celle du «livreur de poules» est pourtant un modèle de ce que le cinéma roumain fait de mieux aujourd'hui : un fonctionnaire (Vlad Ivanov, l'avorteur de "4 mois, 3 semaines, 2 jours" et le policier dialecticien de "Policier, adjectif") parcourt chaque jour les routes avec un camion chargé de poulets. Sa seule étape se fait dans un petit restaurant, et le livreur va lentement tomber amoureux de la patronne, organisant pour ses beaux yeux le vol dérisoire des œufs de sa cargaison. Dans la Roumanie de Ceaucescu, quel est le plus grand crime ? Se laisser aller à la possibilité d'un adultère ou détourner la propriété, aussi ridicule soit-elle, de l'État ? La question est posée à nouveau dans La légende des vendeurs d'air. Cette fois, ce sont deux teenagers qui bricolent une escroquerie rocambolesque à base de bouteilles vides ; mais le film montre surtout le désir de liberté qui s'empare d'une jeunesse à l'étroit dans le carcan communiste. Le tout est filmé avec un sens magistral de la durée et de l'espace et joué à la perfection par ses deux jeunes comédiens. L'ordinaire du cinéma roumain est décidément extraordinaire ! CC


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