En réaction

Ça n'a échappé à personne, l'actu estivale autour des expulsions de Roms a encore empuanti l'aura déjà bien nauséeuse de la gouvernance française. En lien avec cette situation honteuse, une projection du dernier film de Tony Gatlif, Liberté, est organisée cette semaine Salle Juliet Berto. FC & CC


Cette séance spéciale est organisée conjointement par la Cinémathèque de Grenoble, le Méliès et l'association Antigone. Trois structures dont les représentants se sont accordés sur la pertinence, pour ne pas dire la nécessité de reprojeter le film, sorti rapidement en février dernier. La projection sera prolongée d'un débat, en présence d'Iljir Selimovski, l'un des acteurs. Si d'aventure des sympathisants de la politique actuellement à l'œuvre se préparaient à dégainer un point Godwin pour la comparaison entre la France d'aujourd'hui et celle de Vichy que cette initiative (et accessoirement cet article) entraîne, on leur répondra juste que question amalgame, il faudrait déjà qu'ils retirent la poutre de leur œil… Pour mémoire, voici donc la critique du film, publiée dans nos colonnes au moment de sa sortie. Certes, Christophe Chabert ne se montre pas vraiment dithyrambique, mais d'une part, l'œuvre, toute fragile soit-elle, illustre un pan de l'Histoire trop rarement évoqué et nourrira vraisemblablement un débat investi, et d'autre part, dans une situation se nourrissant avidement de la plus nauséabonde des malhonnêtetés, il eut été particulièrement fumeux de modifier la critique, vous en conviendrez. Liberté, de Tony Gatlif
Tony Gatlif filme la déportation des tziganes par la France de Vichy. Un sujet idéal pour le cinéaste, qui n'a cessé d'évoquer la mémoire des Roms dans ses films précédents. Trop, sans doute… Car on ne retrouve que par instants la liberté qui faisait le prix des meilleurs Gatlif. Si la mise en scène évite la complaisance et affirme même une assez belle tenue formelle, c'est bien le scénario, déconcertant de linéarité, qui plombe le film. Le maire humaniste joué par Marc Lavoine ou l'institutrice résistante incarnée par Marie-Josée Croze, personnages certifiés conformes à la réalité, ressemblent à l'écran à de purs stéréotypes de fiction. Gatlif se rattrape quand il filme la communauté tzigane, apportant un humour bienvenu et une vie qui passe autant par la musique — une scène dit en cinq minutes tout ce que Joann Sfar essaie maladroitement de résumer dans son Gainsbourg — que par la prestation éblouissante de James Thierrée. On a déjà loué ici le petit-fils de Chaplin comme un immense animal de scène ; son aisance physique et sa capacité à jouer toutes les émotions sans prononcer un mot donnent en effet à Liberté ses moments de grâce, ceux où le cinéma prime sur le discours.Liberté
De Tony Gatlif (Fr, 1h51) avec Marc Lavoine, Marie-Josée Croze, James Thierrée…
Mardi 14 septembre à 20h30, Salle Juliet Berto
Rés. 04 76 47 99 31


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