Produit du terroir


THÉÂTRE/ A priori, comme ça, on aurait dit "non merci". Un texte de Jean Giono évoquant le monde rural, ça ne nous semblait pas très… comment dire… pop – là-dessus, on n'avait pas forcément tort ! Pourtant, mal nous en aurait pris de passer notre tour : Le Bout de la route, spectacle de François Rancillac qui arrive cette semaine à Meylan après une longue tournée et de nombreux éloges tant presse que public, est une très belle réussite. Le metteur en scène, directeur du Théâtre de l'Aquarium à Paris, magnifie la langue de Giono – déjà emplie de poésie – en utilisant tout son savoir-faire d'homme de théâtre pour un rendu d'une finesse évidente. L'histoire est banale, certes : une nuit d'hiver, un homme toque à une porte, « au bout de la route ». On lui ouvre, il entre. La famille qui vit ici est endeuillée, et l'on comprend rapidement que le voyageur ne va pas très bien lui non plus. Pourtant, ils feront un bout de route ensemble, la mère évoquant « cette glu d'amitié qui nous colle tous à lui [l'invité] ». L'homme magnétise ainsi son entourage ; sans s'en rendre compte, car il est ailleurs, à travailler d'arrache-pied… Dans un décor sobre évoquant l'outrenoir de Soulages, les comédiens, épatants (dont le mastoc et fascinant Éric Challier dans le rôle principal), sont pour beaucoup dans la réussite du spectacle, ne sombrant jamais dans le pastiche d'un monde agricole que l'on imaginerait pittoresque. Un spectacle charnel, sensuel et intelligent, « simple comme un conte, ample comme une tragédie » dixit François Rancillac. AMLE BOUT DE LA ROUTE
Mardi 8 et mercredi 9 à 20h, à l'Hexagone (Meylan)


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Le Discours d’un Roi