Oublier en peinture


La peinture à l'huile traîne un lourd fardeau : celui de sa prétendue désuétude. Une réputation que certains artistes parviennent à faire mentir avec force désinvolture et persistance dans son utilisation.

Tel est le cas du Grenoblois David Lefebvre, qui invariablement la dépose ou la jette sur ses toiles.
S'il travaille à partir d'un matériau photographique (produit par lui-même ou trouvé sur internet), s'il reproduit ces images dénuées de tout intérêt artistique en les dessinant très minutieusement, les retraçant dans un geste précis et maniaque, c'est pour mieux élire ensuite les détails que la peinture viendra déterminer comme centraux.

Pare-chocs de vieilles voitures dans l'allée d'un quartier résidentiel, visages, animaux… le bestiaire se déploie dans une gamme de couleurs pastel irréelles. Quand les œuvres qui le composent ne sont pas « sans titre », elles en assument un à l'objectivité massacrante et sans compromis : « Le chien », « Charlotte »… Car l'artiste, plus qu'il ne garde trace, efface de la substance de son sujet en agissant sur lui. Les dégoulinures de peinture abandonnées dans la précipitation viennent heurter la virginité de la toile, celle-ci se fait le socle d'une disparition plus que d'une apparition dans un geste artistique paradoxal, donc original. A ne pas combler tous les détails, à déshabiller le tableau en laissant apparaître de sa blancheur initiale – sa chair nue –, il fait ressentir un monde en désagrégation, le fantôme d'un moment qu'il plonge dans l'abîme plus qu'il ne l'immortalise. LG


Panda pandi
Jusqu'au 16 octobre au Oui


<< article précédent
Temps forts de la saison