Hors Satan

De Bruno Dumont (Fr, 1h49) avec David Dewaele, Alexandra Lematre…


Revenu de la grisaille auteuriste et parisienne d'Hadjewich, Bruno Dumont retourne sur ses terres de Flandre avec Hors Satan. Rien n'a vraiment changé : les comédiens ont toujours des tronches pas possibles, bredouillent d'incompréhensibles dialogues et traversent des plans tableaux que l'on a largement le temps de regarder jusqu'au moindre brin d'herbe. Dumont ronge donc à nouveau son os, et cela pourrait être suffisant pour qu'on aille voir ailleurs, tant ce cinéma d'esthète arrogant nous tombe des yeux. Mais le cinéaste n'a jamais été aussi frontal dans son discours mystico-catho-chtarbé que dans Hors Satan. Qu'est-ce qu'on y voit ? Un type bizarre qui traîne avec une fille gothique. À intervalles réguliers, elle lui demande de coucher avec lui. Il refuse. Quand quelqu'un a le malheur d'éprouver du désir envers elle, le type sort un fusil et bute le concupiscent. Et si c'est une autre fille (si possible avec des écureuils sous les bras) qui s'avère un peu chaudasse, il la viole pour faire sortir le diable de son corps. Enfin, pour ceux qui n'auraient pas encore compris, le gars accomplit aussi des miracles. On se pince parfois pour se dire qu'on ne rêve pas, que le délire de Dumont, déjà bien hardcore sur la fin d'Hadjewich, n'a pas atteint ici une forme de dinguerie illuminée. Mais non. Entre deux bâillements consternés, Hors Satan est un film qui fout la trouille, comme la projection sans tabou d'un esprit bizarre pour qui il faut fouiller la chair par le sexe pour voir la couleur d'une âme — illustrant ainsi littéralement la blague éculée : Satan l'habite. Dumont, comique incompris ?
Christophe Chabert


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