Jean-Paul Angot : « Ce n'est pas l'Annapurna ! »

En ce début d'année 2013, Jean-Paul Angot, le nouveau directeur de la MC2, a pris ses fonctions. On est donc allés le rencontrer dans son splendide bureau pour en savoir un peu plus sur lui et son projet.


Michel Orier parti cet été rejoindre le Ministère de la culture, c'est Jean-Paul Angot, ancien directeur de l'Espace Malraux de Chambéry, qui a été nommé cet automne pour prendre les rênes de la MC2, la plus grande scène nationale de France. Une mission qu'il envisage on ne peut plus sereinement. « C'est un métier directeur de théâtre : que l'on soit là ou ailleurs, on aborde le sujet de la même manière. La MC2, ce n'est pas l'Annapurna !  Pour moi, ce poste n'est ni plus ni moins qu'un prolongement, même si c'est particulier puisque je connais la ville et le lieu, comme spectateur et comme professionnel. »

Car Jean-Paul Angot a un lien fort avec Grenoble. « J'étais administrateur de Chantal Morel [metteuse en scène grenobloise incontournable, qui a notamment dirigé le Centre dramatique national des Alpes à la fin des années 1980 – ndrl] pendant dix ans, jusqu'en 1994. Puis j'ai été à la MC2 de 2002 à janvier 2006. J'ai participé à la réouverture, et je suis resté une saison ensuite, avant de rejoindre Chambéry. Cette maison, j'y suis donc très attaché. C'est là que j'ai vu mon premier spectacle étant môme. Quand on est directeur de théâtre et que l'on a la possibilité de diriger une maison comme celle-là, c'est incontournable. C'est donc à la fois un choix professionnel, mais aussi un choix personnel. »

iPad et électisme

OK. Et quelle sera la patte Angot alors ? « Continuité, rupture... Ce sont des mots pour commenter ce que l'on fait. Pour ma part, je fais mon métier, puis voilà... De toute façon, on est toujours après quelqu'un et avant quelqu'un d'autre... Je suis juste très heureux d'être là, dans les traces de Michel Orier. » Un Michel Orier qui a fait de la MC2 une scène pluridisciplinaire d'excellence, réputée aussi bien pour son exigence musicale (le volet classique représente un tiers de la programmation) que pour la diversité des spectacles présentés (du théâtre, de la danse, du nouveau cirque...). « Je revendique l'éclectisme, donc je me sens vraiment bien ! »

Le profil de Jean-Paul Angot, très axé théâtre, semble néanmoins légèrement différent de celui de Michel Orier, qui portait avec conviction la programmation classique. « Je ne sais pas d'où sort cette perception. Sans doute de mon CV. J'ai été disquaire, j'écoute de la musique toute la journée, j'ai un iPad qui est rempli aussi bien de Ligeti, Mozart, Wagner que de Bob Marley... Il faut juste veiller à avoir la même exigence dans toutes les disciplines, et savoir s'entourer, être à l'écoute. De toute façon, il n'y a pas de genre que je n'aime pas – j'ai par exemple voulu être danseur, donc j'aime la danse aussi ! »

« Généreux et flamboyant »

La MC2, c'est ainsi de la musique, du théâtre, de la danse... et des indisciplinés. Une catégorie étrange, que l'on retrouve en début de plaquette (comme cette dernière est classée par genre), qui ressemble à un fourre-tout (on y trouve du cirque, du théâtre atypique, de la danse), et qui paradoxalement renferme certains des spectacles les plus risqués (ceux des metteuses en scène Julie Bérès et Véronique Bellegarde ou du circassien Yoann Bourgeois par exemple).

« Pour ma part, je n'utiliserai pas ce vocable. Je pense qu'il ne va pas rester. Bien sûr, j'ai pu en comprendre la nécessité à un moment ou un autre. Mais maintenant, du fait que tout évolue, ce terme ressemble plus à une espèce de prévention. Ça ne peut pas être une catégorie en soi. » Bonne nouvelle ! Ce sera donc l'un des premiers changements de l'ère Angot. Il y en aura d'autres ? « Trop tôt pour le dire. On va boucler la saison suivante, qui est déjà bien engagée. C'est plutôt sur 2014/2015 que je pourrai vraiment m'exprimer sur des choix. Une saison qui marquera d'ailleurs les dix ans de la MC2. Du coup on fera quelque chose de généreux et flamboyant ! »


Encadré : Le projet

Jean-Paul Angot souhaite poursuivre le travail entamé par Michel Orier. Ainsi, la MC2 restera « une maison pour les artistes, où ils peuvent créer. Ce n'est pas simplement une maison de présentation de travaux ». Une maison « qui se doit d'être en lien et en rapport avec d'autres lieux à une échelle européenne ». Enfin, Jean-Paul Angot l'assure, il sera attentif à la place des artistes femmes. « Dans le monde culturel, le déséquilibre homme femme est anormal et injuste. Il y a véritablement quelque chose de déséquilibré dans la prise de parole, qui se traduit surtout en amont dans la production. Il faut donc travailler là-dessus. »


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