Pour fêter ses deux ans d'existence, le collectif grenoblois Avalanche invite le duo milanais Sea Punk Gang. L'occasion rêvée de faire le point sur ce courant éponyme improbable, venu des fins fonds d'Internet. Damien Grimbert
Non content de nous faire découvrir en permanence des courants musicaux venus des quatre coins du monde, Internet a passé ces dernières années l'étape suivante, en les créant de toutes pièces. Et à ce titre, la mouvance Seapunk est un cas d'école. Tout commence en juin 2011, lorsqu'un petit réseau d'amis venus des quatre coins des États-Unis et issus de milieux créatifs (DJs, producteurs, graphistes, designers, clippeurs, stylistes…), s'amuse à imaginer, par tweets interposés, un courant esthétique et musical inédit. Rassemblant leurs obsessions communes pour les débuts d'Internet (cette époque fascinante du milieu des années 90 où tous les médias fantasmaient sur la « cyberculture » et les « autoroutes de l'information ») autour d'une thématique marine, le courant Seapunk naît ainsi d'un kitschissime melting-pot d'influences comme seule la nerdosphère peut en générer.
Jeu vidéo Sega Ecco The Dolphin, séries télé Seaquest et Bob L'éponge, film Waterworld, dessins animés japonais, mouvement new age, trance commerciale… Le courant Seapunk s'épanouit sur les réseaux sociaux pendant tout l'été sous forme de visuels de dauphins, sirènes et palmiers reconstitués en fausse 3D vintage, de looks incorporant cheveux teints en verts, vêtements délavés couleur turquoise et colliers de coquillage, et de morceaux musicaux piochant à la fois dans la house et la techno des années 90, la pop et le R'n'B, le rap dirty south, la tropicale, la trap, la bass music…
À l'automne 2011, l'heure des choix semble venue. Certains membres du petit groupe décident de prendre leur distance avec cette mouvance partie d'une simple blague (Lil Internet, le rappeur Le1f…), d'autres, comme Ultrademon ou Zombelle, de capitaliser dessus en créant un label mêlant sorties digitales et merchandising : Coral Records Internazionale. Dans la presse branchée internationale, apparaissent les premiers articles consacrés au phénomène. En Europe, quelques artistes précurseurs rejoignent le mouvement, comme Panteros666 en France, ou CH1AMU et G14D du Sea Punk Gang en Italie. Un an plus tard, le courant fait son apparition dans la sphère mainstream, par le biais d'artistes comme Rihanna ou Azealia Banks qui récupèrent son imagerie. Six mois plus tard, le seapunk débarque enfin sur Grenoble, par le biais d'une soirée qui devrait permettre à chacun de se faire son propre avis sur cette étrange vague subaquatique. Considérez-vous prévenus.
Avalanche Collective 2 Years, avec Sea Punk Gang, Phazz et Gorgeous Elephant
Samedi 9 mars au Bar MC2