Splendeur et misère d'un beauf extraordinaire


À la question : « qu'est-ce qu'un beauf ? », Joël Séria et Jean-Pierre Marielle répondaient de manière définitive en 1977 dans Comme la lune, apothéose de leur collaboration après Les Galettes de Pont-Aven. Encore plus abouti que le précédent, il est pourtant méconnu et on ne peut que saluer l'initiative du cinéma de quartier des Barbarins fourchus qui le programme en compagnie d'un péplum culte de Cottafavi, Hercule à la conquête de l'Atlantide, dans le cadre d'une « carte blanche à Jean-Pierre Marielle ».

Revenons à Comme la lune : Marielle y incarne Roger Pouplard, que l'on découvre aux crochets de sa maîtresse, belle plante qu'il astique avec le même soin que sa bagnole adorée. Les dialogues grandioses et outranciers, le premier degré absolu de Marielle et la description d'une France bien rance créent un effet de distance envers le personnage que la suite ne fera qu'intensifier.

Qu'est-ce qu'un beauf, donc ? D'abord un individu autosatisfait « J'suis bien » répète Pouplard à l'envie et en toutes circonstances qui s'adapte à son environnement et finit toujours par le plier à ses médiocres aspirations. Il subira ainsi les contrecoups de son attitude méprisante qui le plongent dans le pathétique ; rien, pourtant, ne semble vraiment l'atteindre. Seul le regard du spectateur change : le beauf splendide devient un beauf misérable, mais son essence de beauf demeure inaltérée. Tout comme le film, qui affiche la patine vintage des années 70, mais dont le mordant n'a pas pris une ride.

Christophe Chabert

Cinéma de quartier n°34 : Carte blanche à Jean-Pierre Marielle
jeudi 11 avril à 19h et 21h15, à la Salle noire


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